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Prêt à foutre le souk et tout le monde à cor-da

Début de final Day fracassant. Kool Shen a eu le temps de mettre le feu puis de se prendre la foudre en 1H30 de jeu, moment choisi par les floors… Pour mettre le tournoi en pause, pendant 1H30. Bruno reprendra le 6-left dans la peau de chiploser, sur l’estrade télévisée.

Bruno Lopes

« I’m gonna win it » glisse Kool Shen à sa collègue Leo Margets qui l’encourage derrière le comptoir du rail. « Et quand je me mets à parler anglais, c’est soit que je suis bourré, soit que je ne me rends pas compte du danger » plaisante le rappeur-grinder, étonnement détendu.

Lopes_Margets

On a effectivement connu Kool Shen plus sanguin, voire même plus agacé, surtout après le scénario de ce début de finale. Parti avec le 2e plus gros tapis, le Team Pro a réalisé le départ parfait, en s’offrant la première élimination du jour, avant de connaître une chute brutale.

Shortstack, Judith Bielan open 5 blindes depuis le CO, en se laissant 4 blindes derrière et Bruno se réveille avec AJ en grosse blinde. Tapis annoncé, payé et Lopes domine parfaitement le A9 adverse. Le board K63210 est sans appel : flush-max et Bruno file vers sa première table finale WSOP, avec près de 70 blindes.

Le rail commence à s’organiser autour de la “featured table”. Les grinders français ont sorti les drapeaux, le Team Wina monte le Kop, avec Stéphane Matheu, Melvin Pasquier, Leo Margets et biensûr Tonin Teisseire, partenaire de crime de Bruno, dans le rôle de capo.

Melvin_Stéphane

Le public français se fait entendre dès les premières minutes, d’autant que Kool Shen attaque parfaitement la table finale, avec une bataille de blindes remportée face à Samuel Wagner. Open 190 000 de l’Américain (sur 40 000 - 80 000), défense du Français, c-bet 225 000 payé sur 8K3, 2-barrel 450 000… Et raise 1 200 000 de Lopes. Un move puissant qui fera lâcher Wagner, Kool Shen est à 9 millions de jetons, 110 BB, chipleader.

Tout les voyants sont au vert, et pourtant, Bruno va alors enchainer les accidents. Open Michael Vela 175 000 UTG, payé une fois, payépar Kliper au HJ, par notre Team Pro au bouton, et payé aussi par Checkwicz en SB. Le flop vient 867 et la SB lead pour 250 000. Payé par Vela et raise Kliper, pour 960 000. La parole arrive sur Bruno qui envoie tapis pour 9 100 000… Et c’est payé par la SB. Tank-fold de Kliper, qui dira folder 8-8, show-down ! 66 pour Bruno et… 109 chez Checkwicz. Pas de doublette, Lopes retombe à 4,5 millions.

Bruno Lopes

Pour ne rien arranger, Bruno se fait prendre dans un seet-up quelques minutes plus tard : open-shove 18BB de Wagner depuis le bouton. Le Français trouve 88 dans les blindes. Largement bon contre la range adverse… Mais pas contre le 1010 de Wagner. Pas de 8, Bruno chute à 20 blindes.

Entre temps, on avait tout de même perdu Angela Jordison, Richard Lowe et John Thornton. Ils seront donc 6 à revenir sous les projecteurs de la « TV Table ». Pour se caler sur les horaires du streaming PokerGo, les floors ont annoncé 1H30 de pause, les finalistes sont invités à revenir à 15H pour le dénouement de ce Seniors High Roller.

« Ce début a été fantastique, se marre Kool Shen en rejoignant les copains sur les bords du rail. J'avais 9 millions il y a dix minutes, j'en ai plus que deux. Je suis pas tilté, mais elle va faire du bien cette pause ». Malgré le scénario, Bruno semble étrangement détendu, et distribue les vannes avec son compère de trash-talk, Tonin Teisseire.

« Je te l’ai dit hier : je vais le gagner, je le sais ! - Attends, on avait dit qu’on faisait finale ensemble aussi . - Non mais s’il faut que je compte sur toi, on est mort. Par contre, tu seras obligé de faire le breakdance à la fin, plaisante Bruno, en référence à cette fameuse célébration, où il nous avait gratifié d’une superbe coupole sur l’estrade des WSOP pour célébrer la victoire de Tonin. Avant la coupole, tachons d'abord de reconstruire un dôme de jetons.

Bruno Lopes

A base de Popopopot !

Trois français sont à 26 left sur l'un des tournois les plus prestigieux de l'été David Benyamine, Sonny Franco et Elie Nakache en route vers le million Event #66 : Pot-Limit Omaha Championship 10 000 $ (Day 3)

Benyamine_Franco

Et si les bonnes nouvelles venaient d'un tournoi qui ne sourit que rarement aux français, le 10 000 $ PLO Championship ? A 48 joueurs restants à la reprise ce midi, ils étaient encore 5 à croire en leurs chances dans un tournoi réservé aux fines lames du poker à 4 cartes, avec notamment Niklas Astedt, Stephen Chidwick, Uri Reichenstein ou Michael Mizrachi présents dans le field restant.

Après un premier niveau sanglant qui a vu le field presque divisé par deux, trois d'entre eux sont encore dans la course, avec des tapis au-dessus de l'average, David Benyamine, Sonny Franco et Elie Nakache.

Sur ce Day 3, on a rapidement perdu Karim Lehoussine, qui démarrait avec 13 blindes et semblait bien parti pour doubler quand il a mis tous ses jetons au milieu preflop avec AAQT. Payé par Nitesh Rawtani avec AJ75, il se voyait beau mais n'avait pas vu la quinte trouvée par son adversaire sur le board, pour finir son parcours en 46e place pour 31 242 $.

Bruno Fitoussi

C'est ensuite Bruno Fitoussi qui va prendre la porte sur une table à majorité française qu'il a partagé avec David Benyamine et Sonny Franco. UTG+1, il paye la relance à 75 000 de son voisin de droite. La grosse blinde s'invite également à la fête. Sur le flop 658, Bruno est le premier à dégainer une mise à 150 000, que le relanceur initial choisit de check/raise à tapis pour les 700 000 de King Fitoussi. Bien embêté, il finit par payer avec T956 pour deux paires, gutshot et backdoor flush-draw, tandis que son adversaire a trouvé un brelan de 6 avec AJ66. Notre français ne trouve pas l'un des ses outs sur le reste du board et chute en 39e position pour 36 238 $. Pas très emballé par le Super Seniors qu'il était en train de deep run, Bruno avait choisit l'option "Go big or go PLO" pour soit monter un gros stack sur le Seniors soit prendre part au 10 000 $ PLO. Finalement, il a peut-être bien fait puisqu'il réalise un nouvel ITM, après sa 61e place l'an dernier.

David Benyamine

Sur cette table, l'homme en forme s'appelle David Benyamine, qui surfe sur le run good depuis le début de ces WSOP et a jump dans ce tournoi à la dernière minute au cours du Day 2 après sa sortie à la 5e place du 50 000 $ PPC. D'ailleurs, cette possibilité de re-entry jusqu'à la fin du level 13 a beaucoup fait débat, les joueurs étant alors finalement déjà proche des places payées. Bien en a pris au "meilleur joueur de poker du monde" comme aimait l'appele Benjo à la grande époque, puisque le voici 3e en jetons à 26 joueurs restants. Et pourtant, il faisait partie des plus petits tapis de sa table il y a à peine une heure avec 600k et le voici à 3 millions. Son dernier fait d'arme, l'élimination d'un joueur avec A7K8 contre KQJ8 dans un pot 3-bet sur un flop TK5 où il s'est fait check/raise all-in.

Sonny Franco

Déja auteur d'un deep run sur ce même tournoi, Sonny Franco poursuit un Vegas 2024 exceptionnel avec son 4ème Day 3 du séjour, lui dont la plus grosse performance du séjour reste pour l'instant sa 9e place sur le 5K 6-Max pour 59 665 $. A la première pause de la journée, il pointait à 2,4 millions, soit l'average. "C'est vraiment un tournoi incroyable, il y a à peine 2 ou 3 tops par table, c'est quand même pas beaucoup pour un 10K", me confiait-il à la pause, avant de confesser qu'il s'était un peu "chié dessus" au moment de payer le tapis d'un short avec AKK6. "Si j'avais eu un flush-draw, j'y serai sans doute allé, et je l'aurais bust parce qu'il avait AQQ4". 29e de cette épreuve l'an dernier, pour sa première participation à un tournoi de PLO aussi cher, Sonny a déjà fait mieux cette année et semble aussi serein que d'habitude. Avec 4 cartes ou 2 cartes, même combat.

Elie Nakache

Enfin, last but nos least, on a vu émerger un certain Elie Nakache tout en haut du chip-count, avec 4,9 millions à son top. L'ancien prof de maths spécialisé dans les Expressos s'est fait un petit plaisir en prenant part à ce PLO Championship. "J'ai vendu quelques parts, et c'est la première fois que je le joue", avoue-t-il. Pas le moins du monde impressionné par le field restant, Elie a l'air tranquille à la table, totalement détendu et déconnecté des enjeux. "Au moins, on s'amuse plus que sur un tournoi de Hold'em", me déclare celui qu'on a déjà vu deep run le Millionaire Maker (529e pour 5 000 $) alors qu'il est arrivé il y a à peine 6 jours à Vegas. Malheureusement, après avoir tutoyé le chiplead pendant quelques minutes avec près de 5 millions de jetons, le grinder marseillais a été victime de plusieurs mauvais coups où il a perdu la moitié de son stack sans showdown. "Je m'en veux de comment j'ai joué ces coups", avouait-il avant d'aller prendre une pause salvatrice. Avec 2,7 millions à la pause, Elie est encore dans le peloton de tête et peut clairement croire en un avenir radieux avec plus de 50 blindes à la reprise, lui dont la meilleure perf' reste à ce jour la 2e place sur un Side Event disputé en marge du PSPC en début d'année dernière, pour un peu plus de 60 000 $.

Ce tournoi prévu sur quatre jours pourrait bien se terminer ce soir, si l'on en croît la vitesse des éliminations en ce début de journée. Enfin, ça devrait quand même logiquement se ralentir à l'approche des demies avec une structure aux petits oignons. Ils ne sont déjà plus que 26 à la première pause, sur un tournoi dont le vainqueur repartira avec la coquette somme de 1 320 945 $, succédant à Lou Garza, vainqueur l'an passé.

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Franco bosse fort les Day 3

Sonny Franco bulle la finale du PLO Championship, envoyant ainsi… Deux autres Français sur l’ultime table. Enchainant les Day 3 depuis deux semaines,Sonny Franco s’arrête encore une fois aux portes d’un TF WSOP tandis que David Benyamine et Elie Nakache joueront pour le bracelet et 1,3 million de dollars.

Event #66 : Pot-Limit Omaha Championship 10 000 $ (Day 3)

Franco

« C’est incroyable, je fais 11e, 10e et 9e… Jamais je l’aurai cette finale WSOP » rage gentiment Sonny Franco, sur le chemin du pay-out. Short-stack depuis de longues heures, le Français vient de terminer bubble-boy du prestigieux 10 000 $ PLO. L’un des plus beaux MTT pour les amateurs de “4 quartes”, dont Sonny fait complètement partie.

« C’est mon tournoi préféré. Plus même encore que le Main Event. Ça fait que deux ans que je le joue, mais je fais 28e, puis 10e. Je kiffe le PLO en tournoi », confesse Franco, pourtant pas le plus grand spécialiste de cette variante. « J’en ai quand même joué beaucoup. C’est surtout le format tournoi que je connais. Tu dois savoir gérer ton stack, bien choisir tes spots ».

Le quintuple vainqueur WSOP-C a savamment manier le peu de jetons qu’il lui restait pour percer ce Day 3. Tombé autour des 20 blindes à 20 left, Franco fait le yoyo durant toutes les demi-finales. Un coup crucial BB contre UTG où Franco fera deux paires contre la quinte backdoor-ventrale de Mahn Nguyen le fait tomber sous les six blindes. Envoyant l’essentiel de ses jetons avec 4-5-6-7, il est obligé de folder dans un pot 3-way sur le board A910A, et perd sa dernière blinde et demi quelques plus tard sur une rencontre 4-way anecdotique.

Sonny échoue donc encore une fois une porte d’une finale WSOP, l’un de seuls accomplissements qui manque à longue liste d’exploits (il a tout de même fait 2e d’un WSOP Europe à Rozvadov, sur le 10 000 $ 6-max). « Ça reste une belle perf’. Et surtout, c’est mon cinquième Day 3 d’affilé sur ces WSOP »

Franco a effectivement enchainé un Day 3 sur le 3 000 $ 6-max (11e, pour 37 419 $), le Monster Stack (154e, pour 9 210 $), le 5 000$ 6-max (9e, pour 59 665 $), le Millionaire-Maker (157e pour 10 890 $), et enfin ce 10 000 $ PLO (10e, pour 79 276 $). Une série de runs absolument ahurissants, qui permettent d’assurer un Vegas plutôt positifs… Et encore, il est loin d’être terminé. « Je me tâte à faire le satellite du 25k PLO, mais ça joue maintenant et je suis un peu fatigué. Il y a encore le 10 000 $ au Wynn ou le 10 000 $ Mystery Bounty et bien sûr, le Main Event » rappelle Sonny.

Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, l’élimination du Français assure aux deux autres Bleus encore en piste une place en table finale du 10 000 $ PLO Championship. Une densité improbable, notamment au vu du nombre de partants bleus. Remportant un gros all-in 3-way avec AA-xx, puis un 30-70 chanceux contre Ferenc Deak, Elie Nakache arrive en finale avec le 3e plus gros tapis en circulation.

Après sa 10e place sur le Big O Championship et sa 5e place sur le PPC hier, David Benyamine confirme son retour en forme et pourrait bien réaliser un nouveau gros coup sur cette édition. Sélectionnant finement les spots, et trouvant quelques calls audacieux, il aura 53 blindes au départ du combat, le menant peut être vers un 2e bracelet WSOP, 16 ans après celui acquis en Omaha8.

Dernier round

Parti 2e en jetons sur sa première finale WSOP. Bruno Lopes voit ses espoirs de bracelet douchés en quelques minutes et se contente de la 6e place, pour 99 203 $.

Event #65 : Seniors High Roller 5 000 $ (Finale)

Kool Shen

Pas de “grosse prod”, de caisses claires qui claquent ou de basses grondantes qui donnent envie de tout casser. Pour accompagner la table finale de Kool Shen, on choisirait une “instru” bien plus grise, avec un air de piano façon “That's my People”, ou un sample mélancolique comme dans « Laisse pas trainer ton fils ».

Aujourd’hui, c’était plutôt « laisse grinder ton vieux ». Sur une nouvelle scène braquée de projecteurs, Kool Shen kickait son couplet final sur le High Roller Senior, réservé aux grinders issus de la génération Fonky-Tacchini.

« Regarde-les, ses adversaires ! Bruno ça pourrait être le fils d’un de ces gars ! » scandait Antonin Teisseire, sur les bords du rail. Que l’on parle de physique ou de poker, Bruno est effectivement l’un des “Seniors” les plus fringants et les plus costauds. Le vécu a creusé quelques rides naturelles, les cheveux savamment peignés ont pris des teintes grises, mais Kool Shen a l’air plus jeune, plus fort et plus déterminé que ses adversaires.

TF Senior HR

« Ca fait des années qu’on lui parle de ces Seniors Event » rappelle Mustapha Kanit, l’Italien évoquant le spot unique que représentent ces tournois-là, qui semblent taillés sur mesure pour Bruno. A buy-in équivalent, les fields y sont bien plus "soft" que sur les autres tournois WSOP. Un joueur de son calibre et de son expérience saurait en tirer un avantage. Kool Shen l’avait déjà démontré il y a trois ans, avec un deep run énorme sur le Seniors Championship, dont il terminait 24e, sur 5 404 joueurs, suite à un bad beat qui lui restait encore « en travers de la gorge ».

Cette fois, c’est sur le tout nouveau 5 000 $ Seniors High Roller, plus cher, légèrement plus relevé, que Bruno s’offre une deuxième chance. Avec le 2e plus gros tapis au départ de la table finale, un “edge” supposé sur ce field relativement anonyme, malgré la présence du bracelet WSOP Kevin Nathan ou du reg américain Michael Vela, Bruno tient une opportunité en or d’aller décrocher les 573 barres, et surtout, le bracelet WSOP.

Kool Shen

Avant même le début du match, on imagine l’histoire magnifique, la résonance que provoquerait une victoire du NTM sur les championnats du monde de poker, et la signification du bracelet pour notre Team Pro, pionnier du poker français et passionné depuis plus de vingt ans.

Les espoirs sont à la mesure de la déception. Après un scénario terrible, Kool Shen passe du chiplead à la dernière position en une demi-heure de jeu. Ce fameux coup avec brelan de six, parti à tapis contre la quinte flopée de Mark Checkwicz, constitue un tournant, un coup de massue dont Bruno ne se relèvera pas.

Kool Shen

Notre Team Pro parvient tout de même à rallier l’ultime table, sur l’estrade télévisée, dressée au moment du 6-left, qu’il attaque avec très exactement 20BB. Le kop français s’est mis en place. Les Winamax, les grinders bleus, les médias, les observateurs de passage commencent à s’asseoir dans les gradins affichant un grand drapeau tricolore. Les supporters ne devaient pas arriver en retard. Après seulement quinze minutes de finale, Bruno joue déjà son dernier coup.

Une défense avec A8 contre un open CO de Kevin Nathan. Le flop vient A46 et Nathan c-bet chérot, 325 000 (3,25BB), payé. Turn 3, l’Américain poursuit l’attaque de manière drastique : tapis , pour les 1 925 000 restant au Français. Kool Shen tank une grosse minute puis avance ses jetons au milieu. Malheureusement, sa main est complètement dominée par le AQ adverse. Un 8 seulement pourrait sauver le Français. Il ne viendra jamais. Le K river valide l’élimination de Bruno Lopes, qui se contente de la 6e place, pour 99 203 $.

Kool Shen

La dureté de ce jeu fait que ce genre d'exploit prend des allures de défaite. Effectivement, au regard de la situation de départ de finale, des ambitions et des espérances placées dans notre Team Pro, le résultat est décevant. La soirée aidera sûrement à ravaler cette frustration, pour observer de manière plus lucide ce nouvel accomplissement de Bruno Lopes. A 58 ans, il vient d’atteindre une table finale WSOP, l’une des seules qui manquent à son palmarès. Finaliste EPT, vainqueur WPT, runner-up High Roller EPT, vainqueur Sismix… En 15 ans de carrière, Kool Shen a décroché des résultats remarquables sur tous les plateaux, tous les buy-in, tous les circuits qu’il a joués. Les 100 patates gagnées aujourd’hui ne le consoleront pas, mais demeurent un gain colossal, qu’il ajoute à ses 2 millions de dollars accumulés en carrière.

Kool Shen

Depuis le début, Bruno Lopes occupe une place à part dans le paysage du poker français. De par son personnage, son histoire et son charisme, aux tables comme en dehors. Un mélange de classe et roublardise, de suite royale au Wynn et de Seine-Saint Denis, de réflexion et d’impulsivité.

Dans toutes les disciplines, il sait s’approprier les codes pour mieux les casser et affirmer son style. Avec sa sensibilité, son génie et ses failles. Une recette qui lui a permis de parvenir jusqu'en table finale d'un tournoi à 5 000 $ des WSOP. Et qui en a peut être aussi causé sa sortie. Ce soir, le coup est dur à encaisser, mais Kool Shen s'en relèvera. "Jamais down", jamais K.O, disait-il pour clôturer l’un de ses célèbres tracks. Car en aucun cas, ce n'était le dernier round.

Elie, l’élu des Dieux du Omaha

Elie Nakache réalise déjà la plus grosse perf' du clan français sur ces WSOP en atteignant le Day 4 avec le 2eme tapis à 5 joueurs restants, assuré de remporter un minimum de 315 098 $ Event #66 : Pot-Limit Omaha Championship 10 000 $ (Day 3)

Elie Nakache

Ce matin, on avait un pressentiement qu'il allait enfin se passer quelque chose sur le Pot-Limit Omaha Championship qui n'a pas pour habitude de réussir aux joueurs français. Avec 5 représentants tricolores à 48 left, on était en droit de rêver à voir accéder l'un d'entre eux au dernier jour de la compétition. Et si on a bien failli exploser les compteurs avec 3 français à 12 left, seul Elie Nakache reviendra demain à 5 joueurs restants, Sonny Franco bullant la table finale et David Benyamine se contentant d'une frustrante 8e place.

Et pourtant, le grinder n'était clairement pas favori. Spécialiste d'Expressos, format sur lequel il a fait ses gammes et joue un bon gros volume, il s'est passionné pour le PLO depuis l'an dernier, où il a tenté une petite transition en allant défier les gros regs en cash-game. De son propre aveu, "cela ne s'est pas très bien passé". Mais l'expérience était suffisamment intéressante pour lui faire tenter un shot sur un event réservé aux spécialistes, le 10 000 $ PLO Championship, en vendant quelques parts tout de même. "Une fois dans le tournoi, on se rend compte qu'il n'y a pas que des top regs dans le field, loin de là. C'est comme le Main, au début, on est un peu stressé par l'enjeu, mais on se met rapidement dans le flot, on fait ce qu'on sait faire de mieux."

Gros consommateur de contenus orientés PLO, Elie Nakache a mis en pratique ce qu'il avait appris pour monter des bonnes grosses pilasses de jetons sur ce Day 2, à tel point qu'il émergeait rapidement en tête du chip-count en début de journée, à 35 joueurs restants. Son manque d'expérience a failli le trahir, puisqu'il a ensuite perdu 4 coups sans aucun showdown, perdant la moitié de son stack. Revenu dans le ventre mou du classement, Elie ne s'est pas découragé et est reparti au boulot en pratiquant un poker très agressif qui lui a permis de grappiller des jetons et de revenir dans les hauteurs du classement, souvent sans montrer ses cartes.

Elie Benyamine

En table finale, il a notamment pris un très gros coup à David Benyamine, en donnant un gros mal de crâne au 5e du PPC. Après avoir relancé au bouton à 200 000 et s'être fait payé, Elie voit son adversaire donk-bet à 400 000 sur le flop 962. Il paye avec K-7-5-3 sans flush-draw et trouve les nuts sur la turn 4. Deuxième gros barrel à 1,1 million chez David. Elie annonce "pot" pour 4,6 millions et fait folder ce que David dira être deux paires + flush-draw max. "Je suis très content de faire fold ça, confesse-t-il, parce qu'il a peut-être quinze outs contre moi. Et vu le moment du tournoi, je suis déjà très content de prendre les jetons. Le principe du PLO, c'est de beaucoup couper les équités, arrêter le coup le plus vite possible, car comme les équités sont toujours très proches, tu veux arrêter le coup, même si des fois tu fais passer 30% d'équité, t'es content."

Dès l'accession en table finale, Elie Nakache réalisait sa meilleure performance ever sur le circuit live, dépassant sa victoire sur le FPO Aix-en-Provence en 2021 et sa place de runner-up sur un gros Side Event pendant le PPC, pour un peu plus de 60 000 € à chaque foi. Mais surtout, le fait d'accéder au Day 4 lui permet de réaliser la meilleure performance d'un français sur ces World Series avec un minimum de 315 098 $ (et 1 320 945 $ en cas de victoire !) Le record était détenu jusqu'à aujourd'hui par Yoh_Viral avec sa place de runner-up sur l'event #34 pour 292 927 $. "Au moment où je suis arrivé en TF, c'était déjà ma plus grosse perf. J'étais juste très content, je sais que les paliers sont importants, mais cela ne va pas m'empêcher de jouer. J'essaye de faire ce que je pense être le mieux, sans que l'argent en jeu me fasse déjouer. Après, les paliers sont flat, donc il va falloir continuer à parpiner demain."

David Adkins

A quatre éliminations du bracelet et en deuxième position au chip-count, Elie devra néanmois gérer un chipleader qui possède près de trois fois son tapis à la reprise, Joshua Adkins (photo), un joueur au profil de grinder américain typique de middle buy-in, qui n'a aucune ligne en PLO. "Le chipleader, c'est un peu une énigme, nous dira le français en fin de journée. J'avais un mauvais à-priori au début, mais je pense qu'il joue bien, je ne sais juste pas s'il va bien contrôler ses émotions si ça se passe mal pour lui demain. Les deux joueurs à ma gauche ont l'air très forts, l'israëlien est peut-être pas incroyable en PLO, mais il a joué très peu de mains parce qu'il était très short et avait peut-être peur des paliers. Sinon, c'est probablement moi le deuxième moins bon joueur de la table finale."

La reprise aura lieu demain à partir de 14h00, et la bonne nouvelle, c'est que vous pourrez suivre les exploits d'Elie Nakache, en passe de devenir le deuxième français prénommé Elie à remporter un bracelet WSOP, 13 ans après Elie Payan. "Je suis vraiment content que ce soit streamée, que mes potes puissent me voir à la télé, qu'ils voient les cartes, en plus, ils ont des parts sur le tournoi. S'il y a un rail français demain, je serai aussi très content, même si je suis conscient que je ne suis pas le plus connu du circuit. Le bracelet, pourquoi pas... même si j'aime pas trop la fame."

Rail Elie

Le chip-count au départ du Day 4

Siège Joueur Stack BB
1 Joshua Adkins (USA) 27 085 000 169
2 Elie Nakache (France) 9 505 000 59
3 Manh Nguyen (USA) 4 660 000 29
4 Jonathan Bowers (UK) 5 930 000 37
5 Oshri Lahmani (Israël) 1 425 000 9

Les prix restants à distribuer

Place Prix
1 1 320 945 $
2 880 621 $
3 615 251 $
4 436 751 $
5 315 098 $

David Benyamine

Saluons également la nouvelle perf XXL de David Benyamine, décidément très en forme sur ces WSOP. Après sa 9e place sur le 10 000 $ BIG-O et sa 5e sur le PPC, il s'est enregistré quelques minutes avant la fin des late regs au Day 2 du 10 000 $ Pot-Limit-Omaha Championship. Bien lui en a pris puisqu'il réalise une nouvelle table finale, éliminé 8e sur un coup difficile à éviter où il part à tapis avec AJT8 contre le AJ53 de Manh Nguyen sur un flop 853. La turn 9 lui permet de passer devant mais un cruel 3 donne un full à son adversaire. Il repart tout de même avec un beau billet de 130 748 $, ce qui fait pour l'instant de lui le français qui a remporté le plus d'argent sur ces WSOP (en attendant de savoir le futur résultat d'Elie Nakache demain)

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Le cash du siècle pour Élie Nakache

Élie Nakache remporte le deuxième bracelet français des WSOP sur le prestigieux 10 000 $ PLO Championship alors qu'il connaissait à peine les règles il y a deux ans. Malgré un gros déficit en jetons, il renverse la situation après un heads-up à sens unique et réalise le hold-up d'une vie pour 1 320 945 $. Event #66 : Pot-Limit Omaha Championship 10 000 $ (Finale)

Elie Nakache

Après avoir lu l’article du coverage de la veille, Élie Nakache vient me voir avant son Day 4 pour me reprendre sur une citation que j’ai relaté dans le coverage. "Vu les paliers de la TF, je n’ai pas dit que j’allais parpiner, mais que j’allais tapiner." En effet, entre les 315 098 $ déjà sécurisés et les 1,3 millions à la gagne, les écarts financiers entre les 5 premières places de cette épreuve à 10 000 $ sont énormes et ont de quoi faire mouiller leur culotte à n'importe qui. Notre français sait qu'il va devoir faire attention et essayer de gratter les paliers avant de viser la gagne, d'autant que le chipleader possède près de 3 fois son stack à l'entame de la journée à 5 joueurs left.

Jonathan Bouwers

Jonathan Bouwers, 3eme pour 615 251 $

Le plan idéal était que l’énorme chipleader Joshua Adkins fasse le travail et élimine un par un tous les joueurs de la table finale avant de pouvoir l’affronter en heads-up. Et le plan s’est déroulé sans accroc puisque, hormis l’élimination du short-stack israëlien Oshri Lahmani, des mains de Jonathan Bowers, le chipleader a fait le travail sur cette table finale, en éliminant ensuite coup sur coup Manh Nguyen, short depuis un bon moment, et Jonathan Bouwers, sur un gros setup avec flush contre flush.

Elie Nakache

A l'entame du tête à tête, Élie Nakache possède un stack de 12 millions, loin derrière les 39 millions de son adversaire, qui a poursuivi son entreprise de démolition commencée dès les premières heures du Day 2, mais son stack représente tout de même 45 blindes, donc il y a largement la place de jouer. On imagine néanmoins que le rêve de voir un nouveau bracelet français va encore se fracasser sur la dernière marche, comme souvent depuis quelques années. Et pourtant, à la surprise générale, Élie va complètement inverser la tendance sur un heads-up à sens unique qu'il a conclu en à peine 30 minutes.

Joshu Adkins

Le coup-charnière qui le fait repasser devant se produit assez vite, quand les deux joueurs découvrent un flop 8JQ dans un pot 3-bet preflop à l'initiative de Joshua Adkins. Dans un pot de 5 millions, il effectue un c-bet à 1,6 million et se fait call par Élie en possession de KQ84. Les deux joueurs checkent la turn J. C'est sur la river 8 que Élie propose une grosse mise à 5,5 millions, mise sur laquelle l'américain ne parvient pas à lâcher son AAT5. A ce moment-là et après 5 ou 6 mains de tête-à-tête, Joshua Adkins n'a toujours pas mis la main au milieu et semble atteint mentalement. Son langage corporel traduit une certaine frustration et les amis d'Élie présents dans le rail essaient de décrypter cela pour aider leur poulain.

Elie Nakache

Pour enfoncer le clou, Élie case également un énorme bluff qui le fait grimper à 35 millions quand son adversaire chute à 14 millions. Ça y est, il a inversé la tendance sur ce heads-up et on sent que Joshua Adkins peut craquer à tout moment. Hier, au moment du débrief d'après-match, Élie était incapable de se prononcer sur le niveau du chipleader. "Je sais qu'il ne joue pas beaucoup en PLO, il a que des résultats en Hold'em sur Hendon Mob, et c'est plutôt un joueur de middle limits qui n'avait jusqu'alors jamais cash un WSOP. Il est aussi sur un gros shot comme moi. Je me dis que si ça commence à mal se passer pour lui, il pourrait bien craquer mentalement". Et la prédiction était bonne, puisque la dernière main du heads-up ressemble à un petit craquage de l'américain.

Joshu Adkins

Joshua Adkins, runner-up pour 880 621 $

Après une relance à 900 000 de Joshua Adkins avec AAKQ, Élie se contente de défendre avec 8543. Il trouve tout simplement les nuts sur le flop 642 et check/raise à 2 millions le c-bet à 600 000 de son adversaire. Payé, il envoie une nouvelle banderille à 3,5 millions sur le turn K. La rivière T est une belle brique et notre tricolore décide de partir à tapis, réclamant les 9,5 millions à son adversaire. Après trente secondes, Joshua Adkins, drawing-dead dès la turn sur cette main, décide de payer et offre ses derniers jetons au français. "Sur la dernière main, il n'avait aucun bloqueur, fallait juste give up mais il en avait marre. Il a dû se dire que je pouvais pas encore avoir, et cette fois j'avais. Les fois d’avant, pas trop."

Elie Nakache

Élie Nakache explose de joie et, après avoir congratulé son adversaire, rejoint le clan français venu le soutenir. C'était pas le plus gros des rails, puisque Élie n'est pas (encore) le plus connu des joueurs de live, mais un rail qui l'a soutenu dès les premières minutes de cette table finale. "Nakache for the Cash", "Allez Champy", pouvait-on entendre en provenance du kop français. Pour l'anecdote, le rail était composé à moitié de joueurs qui s'étaient rencontrés sur le PSPC aux Bahamas début 2023. En effet, sur ce Vegas 2024, Élie partageait sa villa avec Théo Sastre et Pierre Lewandowski, trois joueurs qui ont sympathisé sur l'événement et partagent depuis de nombreux moments de poker ensemble. Il se murmure même qu'un joueur de cette villa aurait refusé de prendre des parts sur ce tournoi et s'en mordrait un peu les doigts maintenant. Dans le mal pendant ce séjour aux Bahamas, après avoir bust de tout, Élie s'était rattrapé en allant claquer sa plus grosse perf sur l'un des derniers tournois du séjour pour près de 60 000 €, sa meilleure perf' jusqu'à aujourd'hui.

Stream

Alors, clairement, on peut le dire, ce bracelet est une énorme surprise, et quelle surprise ! Puisqu’il y a deux ans, Élie connaissait à peine les règles du Pot-Limit Omaha. Joueur de tournois live et surtout spécialiste d’expressos, il s’est passionné pour la discipline, et en bon gambleur qu’il est, il est allé défier les meilleurs top regs du format en PLO2K€ sur Winamax, un shot douloureux qui ne s’est pas déroulé comme prévu. Son ami Mario, présent dans le rail pour regarder le stream et l’aider à comprendre ses adversaires d’un jour, s’amusait à le chambrer gentiment quand il a atteint le heads-up. "Toutes les caves que t’as lâchées contre les regs de PLO2K€, elles t’ont servi à quelque chose en fait !". Élie s’est vraiment passionné pour ce format, et surtout pour le jeu de tournoi en PLO, à tel point que le 10 000 $ PLO Championship était devenu un objectif. L’an dernier, il avait déjà envie de le jouer, mais c’est cette année, après une bonne période en live, qu’il s’est décidé à prendre part à ce tournoi au milieu de pléthore de sharks de la discipline. "Cela fait deux ans que je suis tombé amoureux de la variante. C’était beaucoup plus rigolo, j’ai joué pas mal de mains de cash-game sur Internet, mais c'est pas ce que je préfère. Faut être un peu tight en cash-game. Moi, j’aime bien jouer beaucoup de mains, et le tournoi c’est parfait pour ça. J’ai regardé beaucoup de contenus sur les tournois, j’en n'ai pas joué tant que ça en live, mais j'avais le feeling que je pouvais faire quelque chose sur ce tournoi de PLO. J’ai regardé pas mal de contenus, j’avais l’air de comprendre ce que faisait les autres, et j'ai progressé par mimétisme."

Elie Nakache

Cette aventure aurait pu s’arrêter prématurément. Sur la toute dernière main du Day 1, Élie tente un gros bluff et se fait payer par un joueur asiatique. Se croyant dehors, il constate qu’il a bluffé avec la meilleure main et qu’il est encore dans le tournoi avec un gros stack pour le Day 2. "J’ai cru avoir perdu avec la main qui gagnait. On m’a callé pour mon tapis sur la dernière main du Jour 1. Du coup, je finis le Jour 1 avec un gros stack. Et après, je finis 2ème du Jour 2, 2ème du Jour 3 et premier du dernier jour. C'est que de la joie, je suis très content d'avoir gagné un bracelet, mais c’est plus le chemin qui était cool que l’arrivée, je redescends là, mais je suis très content de cette aventure." On le saurait à moins, Élie devient le 36e français de l'Histoire à remporter un bracelet WSOP. Le premier de l'été, celui de Thibault Périssat, on n'était pas encore arrivé au Horseshoe. Cette fois, on a pu vivre cette table finale de bout en bout et c'était un gros kiff comme d'habitude. Après deux deuxièmes places, celles de Yoh_Viral et de Michel Leibgorin il y a deux jours, on commençait à frémir de voir la malédiction Poulidor s'abattre à nouveau sur le clan français.

Elie Nakache

Evidemment, devenir millionnaire donne toujours de bonnes idées à un joueur de poker. Quand on demande à Élie quel est son programme pour la suite des Series, il ne tarde pas à nous avouer qu'il sera probablement au départ du 25 000 $ Pot-Limit Omaha qui a débuté aujourd'hui. On reste un kiffeur, même quand on atteint le rêve de tout joueur de poker en décrochant ce bracelet tant convoité. S'il choisit cette option, il devra prendre une pause dans la journée, puisqu'une marseillaise devrait retentir dans l'Amazon Room du Horseshoe. Enfin, elle ne s'appelle pas comme ça, mais ce n'est pas bien grave, vous m'avez compris. Rendez-vous demain pour ce grand moment.

WSOP 2024 - Event #66 PLO Championship 10 000 $ 811 inscrits (re-entries inclus) - Prizepool 7 542 300 $

# Joueur Prix
1 Élie Nakache (France) 1 320 945 $
2 Joshu Adkins (USA) 880 621 $
3 Jonathan Bowers (UK) 615 251 $
4 Manh Nguyen (USA) 436 751 $
5 Oshri Lahmani (Israël) 315 098 $
6 Krzysztof Magott (Pologne) 231 101 $
7 Eeelis Parssinen (Finlande) 172 355 $
8 David Benyamine (France) 130 748 $

Elie Nakache

WSOP 2024 : tous nos articles

Ladies Gaga

Dernière française en lice, Cécile Ticherfatine reviendra demain à 36 left du Ladies, assurée de 4 205 $ avec un tapis dans le Top 10 à la reprise. Event #71 : Ladies Championship 10 000 $ (Fin du Day 2)

Cécile Ticherfatine

Vous le savez, on ne peut pas avoir les yeux partout durant ces WSOP, d'autant que chaque jour, une dizaine de tournois à différents stades d'avancement ont lieu, et ce parfois dans 5 salles différentes réparties entre le Horseshoe et le Paris.

Et pourtant, hier, j'avais fait un tour sur le Ladies, histoire de changer d'air par rapport aux fields habituels, voire des femmes rigoler entre elles et taper le carton sans que des gros machos ne leur disent qu'elles auraient dû 3-bet avec leur As-Roi. J'avais alors rencontré quelques françaises venues disputer leur Main Event à elle, ce 10 000 $ Ladies Championship qui est en fait un faux 10 000 $ puisqu'il ne coûte que 1 000 $ pour les femmes, dissuadant ainsi les hommes de s'inscrire (j'en n'ai pas vu un dans le field, cette année).

Cécile Ticherfatine

En cherchant des françaises, j'étais tombé sur Cécile Ticherfatine, la femme en forme de ces deux dernières années, qui cumule désormais plus de 500 000 $ de gains sur le circuit. Elle était en train de tout mettre avec son As-Roi de coeur qui avait trouvé un tirage couleur sur la turn pour découvrir une belle paire d'As chez son adversaire. Sans coeur sur la river, Cécile devait passer par la case re-entry pour avoir une nouvelle chance de deep run un tournoi qu'elle a coché depuis bien longtemps sur son programme.

Grosse ellipse, aujourd'hui, à l'heure où j'écris ces lignes, Cécile peut brag sur Instagram sur le fait qu'elle vient d'atteindre le Day 3 d'un tournoi qui a rassemblé 1 245 joueuses, puisqu'elle est à 36 joueuses left du bracelet, d'ores et déjà assurée de remporter un minimum de 4 205 $, avec un tapis conséquent de 1 million, la plaçant en 7e position au chip-count.

"Après ma première bullet, où cela ne s'est pas très bien passé, j'ai été très aggro au début pour monter un stack, puis je me suis calmé pas mal parce que je voulais pouvoir agresser à la bulle. C'est prouvé que tu ne peux pas être aggro à tous les moments d'un tournoi, donc j'ai essayé de choisir mon moment en fonction de mon stack et des joueuses à la table. Sur la première bullet, j'ai été un peu trop aggro et j'ai fini par bust contre les As quand j'avais As-Roi. Là, à la bulle, j'ai open 90% des coups et j'ai pas eu beaucoup de résistance. Dès que je voyais de la faiblesse, je prenais le spot. Sur un field comme ça, c'est toujours bien, dès que tu vois de la faiblesse, tu y vas. J'ai monté 680 000 à la bulle, j'ai d'ailleurs éliminé une joueuse à la bulle qui m'a fait une petite livraison. Je l'avais chauffé un peu avant, et elle m'a tout mis (35 blindes) avec une paire de 6 quand j'avais les rois. Elle faisait comme si elle était à l'aise, mais je voyais bien qu'elle était en stress".

Son deuxième Ladies, après l'édition 2023 où elle était sortie sur une horreur en début de Day 2, sa paire d'As se fracassant contre un As-Roi qui se transforme en quinte, Cécile Ticherfatine en a fait une priorité cette année et a voulu se mettre en jambes en faisant le 500€ de l'Aria dès se descente de l'avion il y a quelques jours. "J'ai sauté proche de la bulle, mais c'était surtout une manière de me préparer avant cette grosse échéance, et ne pas arriver direct en mode recherche de performance".

Cécile Ticherfatine

Cécile a aujourd'hui tutoyé le chiplead avec 1,3 million devant elle à un moment, mais elle a perdu un gros spot sur la fin, contre une joueuse asiatique qui avait l'air de bien comprendre le jeu. Elle a check le flop 846 avant de bet turn sur un 4 et bet pot river sur un 6. Elle était en bluff avec Q8 mais moi j'avais une paire de 5.

Marle Cordeiro

Maintenant, le prochain objectif de Cécile est clair : atteindre la table finale. Elle est consciente qu'il y a de la place et même si elle se méfie de certaines joueuses encore en lice comme Marle Cordeiro (photo) ou Jennifer Shahade, le field paraît quand même assez soft pour espérer aller claquer une grosse perf' demain et permettre à la France de réaliser sa 4e table finale en 4 jours après Michel Leibgorin, Kool Shen et Élie Nakache.

Sarah Ramirez

Un petit mot également pour féliciter Sarah Ramirez, autre française dans l'argent sur ce Ladies Championship, une joueuse en forme sur ce Vegas 2024 qui s'était illustrée il y a quelques jours en finissant 4e du Ladies de Venitian pour 11 000 $ et qui détient une bague WSOP-C gagnée à Marrakech en janvier dernier. Elle termine en 120e place pour un gain de 2 107 $.

WSOP 2024 : tous nos articles

Aller plus haut, aller PLO

A peine 24h après sa victoire sur le PLO 10 000 $, Elie Nakache remet ça... Sur le 25 000 $. Un tournoi princier où nos deux Team Winamax font forte impression, à quelques encablures des places payées.

Event #73 : Pot-Limit Homaha 25 000 $ (Day 2)

Nakache

Pas le temps de redescendre de son nuage. Au lendemain de sa victoire sur le 10 000$ PLO, Elie Nakache s’offre un nouveau shot sur le grand frère à 25 000 $. Et plutôt deux fois qu’une. « J’ai déjà re-entry. La première était trop rapide » explique Elie, visiblement du genre à surfer sur le momentum. Bien lui en a pris, Elie a rapidement monté un tapis sur cette deuxième bullet. « J'ai même joué le pot du chiplead contre Shaun Deeb » raconte le joueur. Mais cette fois, les jetons ne sont pas revenus vers lui.

« Je limp 2233 en début de parole. Call MP, call Deeb au CO et un joueur “pot” dans les blindes, payé trois fois. Le flop vient J22. Ça check jusqu’à Shaun Deeb, qui bet cher, je “pot”, “il re-pot”, on get-in et il montre QJ85 ». Elie doit éviter tous les combos de full… J turn. On avait oublié cette out. Carré pour Deeb, qui s’empare d’un pot à 1,6 millions, tandis que Nakache retombe à 400 000 jetons.

Nakache Deeb

« T’as peut être good-run sur le 10 000$, mais celui-là, c’est moi qui le good-run » prévient l’homme aux six bracelets WSOP en direction de son homologue français.

Gus et Joao dans le cockpit

Vieira Hansen

Le Team Winamax est également bien représenté sur ce 25 000 $. Les deux seuls membres du Team à se présenter sur la ligne de départ sont bien placés alors qu’il ne reste qu’un quart des 478 partants. Gus Hansen pris le bon train dès le Day 1 et continue sa marche en avant. Il vient même de passer le million de jetons en éliminant une shortstack sur un duel AAQQ contre KK106. « Le Omaha est une variante que j’adore. Pour autant, j’estime que c’est un de mes moins bons jeux. Je m’attendais à un field composé seulement de Tops, mais c’est plus mélangé. J’ai même vu quelques très mauvais plays » commente le Danois, qui s’en va rejoindre son collègue Joao au moment du break.

Joao Blom
Un petit check-raise river sur la tête de Viktor Blom et voilà Joao Vieira à plus de 1 200 000 jetons.

Le Portugais aussi a également monté un stack à sept chiffres. Naza a mis le boost dès le début de Day 2 et enchaine les bons pots pour s’inviter dans le Top 10 provisoire. « C’est un très bon Day 2. J’ai réussi à doubler dès la première main pour passer près des 500 000. Et depuis, j’enchaine les bons pots gagnés ». 1 200 000 jetons pour Joao, alors qu’on s’apprête à entrer dans le niveau 6 000 - 12 000.

Helppi

Un adage célèbre disait : « Le Omaha est un sport qui se joue à quatre cartes et à la fin, ce sont les Finlandais qui gagnent ». On est encore loin du coup de sifflet final, mais pour l’instant, les Scandinaves confirment leur edge avec Juha Helppi dans le costume de chipleader. Le vainqueur du WSOP PLO Online à 5 000 $ en 2020 a monté un stack colossal de 2 400 000 jetons, suivi par… Son compatriote Eelis Pärssinen. 8e du Championship il y a deux jours, le grand habitué des tournois High Stakes à quatre cartes occupe donc la 2e place provisoire, avec 1 800 000 jetons.

112 joueurs encore en course au moment où j'écris ces lignes. C'est quarante de trop pour entrer dans les places payées de ce 25k PLO record : 2 246 728 $ au vainqueur.

Tom Dwann

Une vieille conaissance de Gus Hansen, à quelques mètres du Danois. La légende Tom Dwan a délaissé les tables de cash-game pour participer à cette petite sauterie à quatre cartes.

Ticherfatine en mission

Deux jours après son arrivée, la joueuse, qui avait fait du Ladies l’un de ses objectifs du séjour, se retrouve sur l’ultime table du dit-tournoi. Pas favorite en jetons, mais avec la confiance, la technique et l’expérience pour retourner la finale à son avantage.

Event #71 : Ladies No-Limit Hold'em Championship (Finale)

Ticherfatine

« Je ne joue pas de Ladies dans l’année. Les buy-in sont généralement assez faibles, les fields pas très grands… Mais celui-là, c’est le plus beau ! Il y a quand même 170 000 à la gagne… Et puis un bracelet aussi » déclare Cécile Ticherfatine. Nous étions alors à trois tables left et la Française avançait doucement mais surement vers son but.

Plus technique, plus aggressive que la grande majorité de ses concurrentes, Cécile savait qu’elle devait bien doser ses attaques pour continuer à progresser dans ce tournoi. « J’étais monté très haut et puis j’ai raté un bluff. C’était trop tentant. Contre mamie américaine, j’avais vu tous les signes de faiblesse que j’avais observé avant. J’open 86 sur sa grosse blinde. Elle call, ça vient KJ-X, je c-bet elle paie. Turn Q, elle donk, je lui revient dessus, elle snap. River, je mets le troisième et j’ai à peine poussé les jetons qu’elle a déjà snap-call avec deux paires. Rien de grave, on va retrouver un spot, remonter un stack, et comme ça on pourra re-bluffer… Ou pas ».

Ticherfatine

Sans besoin de mettre son tapis en jeu, Cécile gratte quelques pions précieux dans des petits coups qui lui permettent de se maintenir, jusqu’à ce gros coup contre Haruna Fujita. La fantasque japonaise relance à 125 000 sur les blindes 25 000 - 50 000. Envoie 50 000, sur le flop Q56, puis 125 000 sur la turn 4. River 4, Haruna ralentit et Cécile bet 200 000. Payé par la Nipponne, Cécile montre un beau KQ, entrainant un joli call-muck : la Française passe à 1,2 million.

Spragg

Cécile a su changer de rythme au bon moment, sachant faire le dos rond, comme ici face à Marle Spragg, qui lui demandait ici le tapis en batailles de blindes

Un tapis qu’elle conservera sur la fin des demi-finales en observant les éliminations, notamment celle de sa voisine Marle Spragg. Le re-steal 44 s’empalle sur les 1010 d’Andrea Sager. Pas de 4, et l’Américaine bulle la TF du Ladies.

Kerstetter

Ticherfatine devra cependant se méfier de Jamie Kerstetter. La commentatrice et joueuse américaine, runner-up du Tag-Team en 2022, parvient sur cette ultime table avec un énorme tapis de 8 000 000 de jetons. Une situation confortable, surtout avec une configuration à forte ICM, avec une joueuse à 10 blindes, et six joueuses autour des 20 blindes.

TF Ladies

Sous l'impulsion de la fantasque Fujita, les dix finalistes célèbrent leur arrivée sur l'ultime table du tournoi.

Siège Nom Nationalité Jetons
1 Shiina Okamoto Japon 5 815 000
2 Mor Kamber Israël 2 250 000
3 Andrea Sager USA 1 500 000
4 Linda Durden USA 1 190 000
5 Cécile Ticherfatine France 1 340 000
6 Haruna Fujita Japon 1 230 000
7 Jammie Kerstetter USA 8 000 000
8 Ceci Liao USA 1 57 0000
9 Susan Bluer USA 1 300 000
10 Ruth Kwiatowski USA 545 000

Sager

Andrea Sager, tombeuse de Marle Spragg, se replace idéalement à l'entame de la table finale

Pas pour le bracelet, pour la gagne !

Cécile Ticherfatine gagne sa place 6 left du Ladies Championship. La braqueuse de Dakar reviendra demain avec un tapis d'outsider pour aller chercher les 170 briques, plus par esprit de compétition que pour le prestige du bracelet.

Event #71 : No-Limit Hold'em Ladies Championship 1 000 $ (Finale)

Cecile Ticherfatine

Nul besoin de jouer les protagonistes pour s’offrir un Final Day de WSOP. Arrivée à 10 left dans un groupe de six joueuses short-stacks, Cécile Ticherfatine s’est cantonnée au rôle de spectatrice, en observant ses concurrentes sortir une à une pour valider sa place à 6 left du Ladies Championship.

« C’était déjà ça en demi-finale, rappelle Cécile, que l’on retrouve dans le bar du Paris avec quelques grinders français, peu après sa qualification. J’ai juste pu faire quelques petits 3-bet pour gratter quelques blindes. Mais sinon, je n’ai quasi pas eu de jeu et je n’ai pas bougé. J’ai démarré la journée avec 1 million de jetons, et j’en ai 1,1 million. J’ai eu ce petit pic à 1,7 million, juste avant ce bluff raté, mais sinon, je n’ai pas bougé » poursuit la joueuse qui envisage déjà le plan de bataille pour revenir dans la course.

« Je pars avec 15 blindes, une autre joueuse (Ceci Liao) est juste en dessous de moi. L’idéal serait de pouvoir gratter quelques blindes afin de revenir autour des 20BB. Ça pourrait me permettre de jouer, d’open davantage, de 3-bet… Alors qui se je retombe près des douze ou dix blindes, ça sera presqu’exclusivement du push-or fold » explique Ticherfatine, qui espère pouvoir développer son edge sur l’une des table finales les plus accessibles du festival.

Shiina Okamoto

Shiina Okamoto sera l'un des pricipaux obstacles dans la quête de Cécile vers le titre WSOP.

« On a perdu deux-trois bonnes joueuses en demi-finale, dont Marle (Spragg, 10e). Il reste la Japonaise (Shiina Okamoto), qui m’a l’air d’être une bonne joueuse. On s’est beaucoup respecté jusqu’à maintenant, je pense qu’elle a compris comme moi qu’il y avait d’autres spots plus faciles. L’Américaine (Jamie Kerstetter) a l’air d’avoir un peu d’expérience, mais étonnamment, elle n’a pas du tout assumé son rôle de chipleadeuse… Elle n’a quasi pas joué un coup ! A part le flip qu’elle gagne pour éliminer l’autre japonaise (Haruna Fujita). Elle a peut être peur de l’ICM ».

A l’image du field, la table finale est encore largement composée d’amatrices, dont la technique est imparfaite, mais qui peuvent aussi lâcher quelques tells. « C’est l’une de mes forces, assure Cécile. Techniquement, j’ai encore beaucoup de choses à apprendre, mais la lecture de tells, je connais bien. Tous les grinders qui sont autour de moi là (elle montre du doigt les Greg Fournier, Clément Michaud et zChance), je peux te dire leur tells. Avec toutes les sessions de cash-game Live, je sais repérer certains signes de force ou de faiblesse. Il ne faut pas avoir peur de regarder les gens dans les yeux, les observer pendant les coups, et voir ce qu’ils ont quand ça arrive au show-down. Alors si vous lisez cet article mesdames, cachez vos mains, cachez vos glottes, cachez vos visages, cachez tout ! ».

Cecile Ticherfatine

Toujours aussi disciplinée et appliquée, que ce soit dans la préparation ou pendant le tournoi, Cécile reste complètement détachée et décontractée par rapport aux enjeux, au prestige qui entoure une table finale WSOP. « Si je joue pour le bracelet ? Pas du tout. Je joue pour la compétition, pour finir première et pour les 170 000. Je n’ai pas regardé le tableau des Pay-outs, seulement la première place. Il y a des joueurs qui me disent “tu te rends compte, tu es à 10 ou 6 left d’un bracelet… Mais moi, je n’ai jamais vraiment rêvé de ça. Je ne réalise pas. Si j’en prends un, tant mieux, je serai très contente, mais je n’ai pas cette faim de bracelet ».

La compétition importe plus que le trophée et Cécile met tous les ingrédients de son côté pour délivrer le moment venu. « Ça fait seulement trois jours que je suis là, et je suis parfaitement recalée. Je fais du sport tous les matins, je me sens en bonne condition, et prête à en découdre pendant des heures demain » affirme Ticherfatine, verre de salade de fruits en main.

Son parcours atypique, les destinations exotiques où elle a monté sa roll, en grimpant les limites de cash-game dans moult casinos d’Afrique, font de Cécile Ticherfatine une joueuse à part. Mais aussi unique qu’elle soit, la joueuse a parfaitement assimilé les secrets, les routines, l’attitude et le mental qui lui ont permis d'intégrer la famille des meilleurs joueurs tricolores. Respectée depuis de longues années dans le poker francophone, elle tient une occasion de se révéler demain au yeux du poker mondial. Pas favorite en jetons, certes, mais avec toute les qualités et la confiance nécéssaire pour réaliser l’exploit qu’on attend tous ! Allez Cécile !

Seat-Draw & Payout

TF

Siège Nom Nationalité Jetons
1 Shiina Okamoto Japon 8 640 000
2 Mor Kamber Israël 1 755 000
3 Linda Durden USA 3 110 000
4 Cécile Ticherfatine France 1 100 000
5 Jamie Kerstetter USA 9 330 000
6 Ceci Liao USA 970 000

Blindes à venir : 40 000 - 80 000 Ante 80 000

Position Prix
1ère 171 732 $US
2e 114 479 $US
3e 81 753 $US
4e 58 910 $US
5e 43 125 $US
6e 32 007 $US

Milgrom Dollars Baby

Les français se font plutôt rares sur les gros tournois de variantes, mais sur le 10 000 $ Stud Hi-Lo, on vient de découvrir Nicolas Milgrom, arrivé aux Etats-Unis à l'âge de 11 ans et spécialiste de variantes depuis une dizaine années. Event #74 : Stud Hi-Lo Championship 10 000 $ (Day 1)

Nicolas Milgrom

Si les fields de No Limit Hold'em, et plus particulièrement les petits buy-ins comme le Colossus, regorge de français inconnus de nos services, il est rare de trouver des tricolores dont on ne connaît pas la background sur les tournois de variantes, et spécialement sur les 10K. Et pourtant, depuis quelques jours, un nom revient régulièrement dans les pages des coverages officiels des WSOP, un certain Nicolas Milgrom, qui affiche un drapeau français sur les rapports officiels.

Alors, quand son nom a encore poppé sur le 10 000 $ Stud Hi-Lo Championship, un tournoi dont les joueurs français connaissent à peine l'existence, hormis exceptions comme Bruno Fitoussi, Paul-François Tedeschi ou Julien Martini, il était temps d'aller rencontrer ce mystérieux Nicolas Milgrom qui, après m'avoir vu le prendre en photo, me demande avec un accent américain parfait "Do you have what you want ?"

Je lui demande s'il est français, ce qu'il me confirme rapidement, avant de le saoûler de questions. Si on ne connaît pas encore bien ce Nicolas Milgrom, c'est parce qu'il est arrivé aux Etats-Unis à l'âge de 11 ans. Une opportunité de travail qu'ont eu ses parents, et qui les a menés à Los Angeles. Il a passé toute sa vie ici aux Etats-Unis, même s'il parle un français parfait. A sa majorité, il commence à jouer online, principalement sur Full Tilt, et s'intéresse rapidement aux variantes, puis bascule vers le live au moment après le Black Friday, en jouant régulièrement au Commerce Casino de Los Angeles, pour le cash-game, et au Bicycle pour les tournois. Après quelques tournois de No Limit Hold'em dès 2013, il se détourne rapidement du format, pour privilégier des tournois de variantes, principalement en Limit Omaha Hi-Lo, tout en grindant les limites en cash-game.

En 2019, après avoir gagné un side event de PLO Hi-Lo sur le WPT LA Classic pour 24 085 $ (toujours son plus gros résultat live à ce jour), s'installe à Vegas en tant que professionnel et passe le plus clair de son temps à grinder la 40$/80$ du Bellagio, principalement en Stud Hi-Lo, Stud, Omaha 8 et Limit Hold'em. Il se fait également kiffer sur des event WSOP, terminant notamment 12e du 3 000 $ H.O.R.S.E sur lequel Paul-François Tedeschi était passé tout près du bracelet, mais peine à décoller, avec quelques belles perfs mais pas très rémunératrices, qui lui permettent pas encore de jouer les plus gros tournois, se contentant de tournois de variantes entre 400$ et 1 500$ dans tous les casinos de Vegas.

C'est en début d'année 2024 qu'un déclic va se produire pour Nicolas qui gagne trois tournois de suite, en Omaha 8 et en Omaha 8 / Stud 8 Mix pour un total de 32 000 $. Il décide alors de mettre 50% de son action sur les 10 000 $ de variantes des WSOP sur Poker-Stake en trouve preneur et le voilà parmi les gros sharks sur quelques épreuves prestigieuses. Après trois places payées sur des events de PLO, il s'illustre en terminant 20e du 10 000 $ H.O.R.S.E.

Même s'il trouve que "le niveau est beaucoup plus relevé que sur ses parties habituelles" et que "les joueurs font moins d'erreurs", il semble confiant sur son niveau de jeu en Stud et Stud Hi-Lo après avoir passé les trois premiers mois de l'année à jouer 16 heures par jour en cash-game au Bellagio. "La structure est vraiment bonne, on peut attendre des bons spots sans être contraint à jouer des mauvaises mains", me dit-il avant de relancer le bring-in avec un 8. Il est payé uniquement par un adversaire qui montre un 7 affiché. Un autre 7 apparaît devant son adversaire sur la 4e et vont suivre une succession de mises sur le reste des deux tableaux, 8-T-6-3 pour Nicolas et 7-7-J-J. On pense alors que les deux joueurs vont split le pot mais c'était sans compter sur le 8-8 caché de Nicolas qui scoop le pot.

"Impossible to beat you today", lui glissera son adversaire frustré, tandis que Nicolas empile les pions sur ce Day 1 du 10 000 $ Stud Hi-Lo Championship. Quand je demande à Nicolas ce qu'il a joué sur ce festival, il sourit et me répond qu'il "a tout joué à part les tournois de No Limit Hold'em". Au moment de lui expliquer que je taffe pour Winamax, j'essaye timidement de lui parler de Nosebleed pour me présenter, et du fait que j'avais suivu Alex Luneau et Seb Sabic sur les tournois de variantes aux WSOP, confiant sur mes chances qu'il ait entendu parler de ça, et pourtant, vu sa tête, j'ai l'impression de lui parler chinois et dois un peu ravaler ma fierté.

Scott Seiver

Les chanceux finalistes du 10 000 $ 2-to-7 Single-Draw ont directement jump sur cette épreuve réservée aux spécialistes après leur table finale, dont le vainqueur Scott Seiver, à la recherche de son quatrième bracelet sur ces WSOP 2024.

WSOP 2024 : tous nos articles

Finale express

Pas eu le temps de vibrer, sinon le temps d'un tapis-payé. Après une finale éclaire, Cécile Ticherfatine doit se contenter de la 6e place, pour un peu plus de 32 000 €.

Event #71 : Ladies Championship 1 000 $ (Finale)

Ticherfatine

« Et bien, c’était court ! » souffle Cécile Ticherfatine, au moment de quitter l’estrade télévisée. Effectivement, 20 minutes pour un “Final Day” de WSOP, c’est un peu léger. D’autant que Cécile s’était préparée pour livrer un gros combat. « Je suis levée depuis 6h ce matin, j’étais en mode “try-hard” à la salle, prête à boxer pour monter quelques blindes et me battre jusqu’au bout… On fera mieux la prochaine fois ».

La joueuse nous avait prévenus hier. L’objectif de ce Day 3 était de revenir dans la course, en grattant les quelques blindes qui lui permetteraient d’open, de 3-bet et de ne pas être cantonnée à une stratégie de “Push or Fold”. Mais le plan ne se déroule pas comme prévu.

Les cartes ne viennent pas et Cécile n’a pas d’autres choix que de passer et de laisser les choses se passer. Pas de spot de shove, même pas un spot de défense, la Française descend à neuf blindes.

« Il fallait toucher un petit peu de jeu pour me maintenir. J’avais vu avec cette configuration que j’étais bouton sur la blinde de l’autre short stack. C’était un bon spot, puisque c’était un profil qui n’allait pas payer light, donc j’allais pouvoir partir à tapis depuis le bouton. Et si je double contre elle, je reviens au dessus des vingt blindes et je me relance dans le tournoi. Sauf que cette fois SB, la chipleader américaine a trouvé KQ ».

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Domination-nation”, Cécile se lève rejoindre le rail français, qui s’apprête à vibrer pour la première fois de cette finale. Greg Fournier, Greg Ceran-Maillard, Clément Michaud, Hicham Mamouki et consorts appellent fort un valet, qui ne vient pas sur le flop 1083… Les supporters ne lâchent rien et hurlent encore plus fort au moment de la turn… J !

« Ce valet turn, il est extraordinaire, commente la joueuse après coup ! Je me dis “sérieux, je vais gagner un 70-30 maintenant, sur la table télé, avec tout le rail ? Bon elle jouait encore pas mal de cartes, puisque c’est à carreau, mais on a le droit d’y croire à ce moment là. »

Rail FR

Maintenant, il faut tenir ! Pas de carreau, pas de dame, et Cécile serai complètement relancée dans cette table finale… K. Flush, busto, c’est fini. Cécile Ticherfatine revient vers la table finale, salue ses adversaires une à une, passe dire un mot aux caméras de PokerGo et rejoint le clan bleu. Pour aujourd’hui, on se contentera d’une 6e place, pour 32 007 €.

« Ça ne sera pas dur à encaisser. C’est elle qui a la meilleure main. Je ne suis pas sorti sur un bad beat, ni sur une erreur », affirme Ticherfatine, qui relativise vite, en retenant sa belle performance, pour son deuxième tournoi du séjour, quatre jours après son arrivée à Sin City.

« J’avais deux objectifs sur ce Vegas, le Main et le Ladies. On va essayer de faire aussi bien sur le Main, plaisante la reg du circuit africain. Avec le boulot à côté (Cécile a des affaires dans la restauration et travail également dans l'associatif), je n’ai pas le temps de me faire de gros Vegas. Je ne suis pas venu faire beaucoup de tournoi donc c’est déjà cool d’en perfer un ».

Cécile Ticherfatine

Et il en reste d’autres. Le plus beau tournoi du monde notamment, mais aussi l’un des plus originaux du monde, le Tag Team, surlequel elle est déjà inscrite avec Clément Michaud. « D’ailleurs, il est ou Michaud, je vais pouvoir le relayer. J’suis prête à jump, d’autant que la journée commence il est tôt ! »

La Razzia Seiver

3 bracelets remportés en trois semaines de WSOP. Scott Seiver réalise un exploit hors-norme le confortant dans la mission impossible qu’il s’est donné : conquérir un bracelet dans chaque variante du jeu.

Seiver

« C’est un sentiment de satisfaction difficile à décrire. Au moment où je vous parle, je suis sur un nuage. Ça signifie tellement pour moi. C’est aussi un pas dans un voyage personnel qui m’anime, où je rêve de remporter un bracelet dans chaque discipline de poker qui existe ». C’est en ces mots puissants et ambitieux que Scott Seiver répondait, à chaud, à l’interview traditionnel post-victoire, devant les micros de Pokernews.

En s’imposant ce dimanche 30 juin sur le 10 000 $ No-Limit Lowball Draw Championship, Scott Seiver remportait effectivement son 3e bracelet de l’été, le septième de sa carrière, et le cinquième dans une variante différente.

Celui-là est glané dans un format particulièrement intense, swingy, où l’affrontement psychologique et la notion de “bluff” prennent une part considérable. « C’est un tournoi incroyablement spécial. Selon moi, c’est un des plus prestigieux de l’année, et je l’ai toujours convoité, depuis très longtemps » poursuivait Scott.

Cette victoire confirme les qualités de lecture, la capacité de Scott Seiver à situer, décoder ses adversaires et à se repérer dans un jeu qu’il semble maitriser à la perfection. Son talent pour les mixed-games est reconnu par tous les maitres de variantes et cet improbable triplé n’en est que la démonstration matérielle. Mais d’ou vient ce don de Scott pour les “mixed-games” ?

Scott Seiver

Seiver Super Saiyan 1

Scott Seiver

Seiver Super Saiyan 2

Scott Seiver

Seiver Super Saiyan 3

Sky is the Limit-Games

« J’ai découvert les mixed-games dans ma deuxième partie de carrière, note Scott, que l’on retrouve le lendemain autour des tables du 10 000 $ Mystery Bounty. La première, c’était exclusivement du No-Limit Hold’em. Surtout du heads-up online. C’est à partir du moment où je me suis vraiment mis au Live, à Vegas, que je suis tombé amoureux des variantes ». Raconte-nous, père Seiver.

Scott Seiver

Scott le jeune

« Quand j’ai déménagé à Las Vegas (en 2008), je me mettais à jouer beaucoup plus de Live. J’ai commencé à trouver le Hold’em de plus en plus ennuyeux, surtout en full-ring. Un jour, je suis à l’Aria, et je vois une table de “Mixed-Games” qui se monte. Je me suis assis, j’ai découvert les jeux et j’ai adoré les gens. Je voyais des profils et des interactions très différentes que celles d’une table de No-Limit. Ce sont vraiment les gens que je trouvais aux tables qui ont démarré mon histoire d’amour avec les mixed-games ».

A ce moment là, Scott Seiver est déjà un “Top” de No-Limit. Vainqueur d’un bracelet sur un massif 5 000 $, pour 755 891 $, le New-Yorkais remporte un High Roller L.A Poker Classic pour un demi-million, avant de commencer ses premières campagnes “mixed-games” sur les WSOP, en 2010.

Première année, trois demi-finales, (en NL 2-7 Single Draw à 1 500 $, Seven Stud 1 500$ et H.O.R.S.E 3 000 $), ainsi qu’une finale en 8-game. L’année suivante, tout juste vainqueur d’un WPT Championship à 1 618 000 $, il atteint sa première finale de Poker Players Championship (7e). Multipliant les tables finales à chaque édition, Scott doit cependant attendre 2018, et sa 9e finale en mixed-games pour ouvrir son compteur, avec une victoire sur le 10 000 $ Limit Hold’em Championship.

Un jeu, pour les gouverner tous

Seiver remet ça l’année suivante sur le 10 000 $ Razz Championship, pour 301 421 $. Un petit bracelet en No-Limit Hold’em en 2022 (sur un 2 500 $ Freezout de 752 joueurs), histoire de montrer qu’on sait toujours jouer avec deux cartes et enfin, ce fabuleux triplé de 2024, avec trois bracelets récoltés, sur le Omaha Hi-Lo Championship, le 1 500 $ Razz et le 10 000 No-Limit 2-7 Lowball Draw Championship. Ajoutez sur le parcours trois deuxièmes places, 23 tables finales WSOP (au total) et vous tenez l’un des palmarès les plus accomplis et les plus impressionnants de l’histoire des WSOP. Mais comment parvient-on à ce niveau de succès dans autant de jeux différents ?

Scott Seiver

« J’ai appris en jouant, affirme Scott. J’étais assez chanceux pour avoir déjà une bankroll décente grâce au No-Limit Hold’em. J’ai toujours voulu jouer contre les meilleurs. Ça ne m’inquiétait pas de perdre. Ce que je voulais, c’était affronter les meilleurs adversaires possibles. J’ai joué assez cher très vite, je perdais et j’essayais de comprendre à chaque fois ce qui n’allait pas, ce que les autres faisaient de mieux. J’ai continué à me battre en partant de là ».

La polyvalence de Scott s’explique par le fait qu’il ne voit pas neuf variantes différentes, mais bien un seul grand jeu, déclinés en plusieurs format.

« Je pense que beaucoup apprennent le poker en étudiant un format de poker en particulier. Je ne vois pas le poker de cette façon. Je dirais que je vois le jeu avec plus de hauteur. Pour moi, tous les formes de poker, ne sont qu’un seul jeu. Il n’existe selon moi qu’un grand principe qui doit guider le jeu et j’essaie de l’appliquer dans chaque format », explique Seiver. C’est seulement après avoir décelé les concepts phares et commun à toutes les variantes de poker, que Scott s’intéresse aux spécificités, notamment théorique, de chaque “mixed-games”.

« Il faut comprendre le jeu. Puis il faut comprendre les différents jeux. Chaque variante a son manuel d’instruction et il faut savoir ce qui fonctionne le mieux pour chacune d’entre elle. A un niveau plus élevé, il faut maitriser la théorie. Des concepts mathématiques poussés, peu importe le jeu auquel vous jouez, ils s’appliquent dans tous les formats. Regarder le poker de cette forme vous fera devenir un bon joueur de poker et non pas un bon joueur dans une variante ».

Qu'est-ce qu'il ne faut pas faire pour un POY ?

Scott Seiver

Scott Seiver s’apparente ainsi au joueur de poker ultime. Sa maîtrise profonde des concepts, sa polyvalence et son expérience font du New-Yorkais l’un des joueurs les plus respectés, les plus accomplis et l’un des chasseurs de bracelet les plus affutés. Sa compétitivité dans tous les formats en font un prétendant naturel pour le très convoité titre de “Player of The Year”, dont il est avec trois bracelets le leader provisoire évident. Et pourtant, pas de tant de points que ça.

Trois bracelets en un festival, c’est une belle performance. Mais hormis ces trois titres, Scott Seiver n’a réalisé que des min-cashs insignifiants (10 ITM au total au 1er juillet). Même pas une autre table finale, le nul !

A l’inverse, Jérémy Ausmus a certes du mal à conclure, mais a la bonne idée de faire une finale WSOP tous les cinq jours. 3e d’un Freezout 2 500 $ de 1 200 joueurs trois jours plus tard, runner-up sur le 100 000 $, 7e sur le 250 000 $, 6e du PPC et 4e de ce même 2-7 Lowball Draw Championship, remporté par Seiver. 6 tables finales en un mois de WSOP. Dans le compte en banque comme au classement POY, ça fait de très beaux chiffres.

Classement POY

Classement "WSOP Player of The Year" au 1er juillet 2024

« Remporter le POY, ça voudrait tout dire, affirme Seiver. Pour dépasser Jérémy, il fallait que je fasse premier ! Ce qui est complètement fou sachant que j’ai gagné trois tournois. Cependant, il est en train de réaliser un festival incroyable, l’un des plus beaux World Series qu’on ait jamais fait. Je suis juste chanceux et reconnaissant de pouvoir être juste devant lui pour l’instant ».

Aussi improbable que cela puisse paraître, quatre joueurs ont déjà réussi à récolter trois bracelets sur une seule édition de WSOP. Ted Forrest en 1993 (en Stud, Razz et Omaha8), Phil Hellmuth cette même année 93 (3 en trois 3, deux en No-Limit Hold’em, puis un en Limit Hold’em), Phil Ivey en 2022 (Stud, Stud Hi-Lo et S.H.O.E) et enfin Jeff Lisandro (Seven Stud, Seven Stud Hi-Lo et Razz). Georges Danzer avait également réalisé cet exploit en 2014, en prenant le premier bracelet sur les WSOP Asia Pacific.

Depuis l’introduction du “POY” en 2004, tous les joueurs ayant remporté trois bracelets (Lisandro et Danzer) sont devenus “Player of The Year”. Les deux seuls joueurs à avoir atteint six tables finales en une édition (Robert Campbell en 2019 et Ian Matakis en 2023), le sont également devenus. Cette année, la course est tellement irréelle qu’une de ses conditions ne sera pas suffisante pour prétendre à ce titre honorifique et l’un des plus prestigieux du poker moderne.

Braquage en cours par commando W

Un bataillon de six Team Pro lourdement armés avance pour braquer le coffre aux Bounties. A peine commencé l’assaut, le sniper Bruno Lopes tire en plein dans le mille et ramasse la prime à 100 barres.

Event #76 : Mystery Bounty 10 000 $ (Day 2)

Bounty

Joao, Adri, Leo, Romain, Julien, Bruno. Voilà les six assaillants prêts à faire sauter la banque sur le Mystery Bounty. Des braqueurs affutés, expérimentés, qui ne comptent plus leurs casses aux quatre coin du globe. Celui pour lequel ils ont été contractés aujourd’hui vaut pour 1 million de dollars, et un beau paquet de primes.

Le commando possède carte blanche. Tout ennemi se dressant devant eux doit être éliminé. Et le scalp sera payé cash. “Matador” depuis sa tendre enfance, Adrian Mateos est l’un des premiers à faire couler le sang, tirant une première enveloppe à 5 000 $. Tout juste de quoi payer une recharge de cartouches.

Bruno Lopes, lui, ne se déplace pour des petites sommes. Le tapis lourdement chargé, Kool Shen rafale dès le début de Day 2 avec une première enveloppe qu’il se garde pour la première pause. Juste avant de revenir à la planque, un shortstack, le prend en embuscade dans un duel imparable, deux As contre deux Dames. Bruno est touché mais parvient à tirer son tapis blessé jusqu’aux postes de défense, à 1 left de l’ITM. Il profite de la pause pour envoyer sa lettre piégée. Celle-ci parvient jusqu’au coffre mystère. Tic-tac, boum ! La banque vient de sauter, la prime à 100k est tombé.

Bruno Lopes Lewis Sitbon Vieira

Popopopop !

Le raid a tout juste commencé que le Team est déjà en train de tout casser. Les maitres-artilleurs Adri et Joao sautent sur le colonel Lopes, vite rejoint par le capitaine Lewis ainsi que les lieutenant Sitbon et Margets. Kool Shen a parfaitement donné la charge, mais le pillage ne fait que commencer.

Sitbon

La connexion espagnole Adri - Leo attend le signal du double-up pour passer à l’attaque. Pour l’instant, c’est Julien Sitbon qui mène l’offensive, avec une superbe remontée de 90 000 à 450 000 jetons. « J’ai double-up dès la première main avec 55 contre 109 chez Haxton. Derrière, j’ai pris quelques coups pré-flop, puis j’ai bust Niall Farell, avec A5 contre KJ 5bb deep », informe le joueur, qui a donc atteint le camp ITM tout en récupérant des munitions.

Lewis

Posté derrière les remparts, Julien couvre le capitaine Lewis, qui vient de lancer une énorme grenade à la tête du Jorge Carvalho. « J’ai cold-4-bet tapis avec deux As, et il m’a payé avec A9. Je crois qu’il voulait mon bounty » analyse Romain, de retour au dessus des 35 blindes.

Vieira

Dans la tente des généraux, Joao Vieira peaufine le plan de bataille, lui qui a jusque là parfaitement guider l’offensive. « J’ai démarré avec 350 000, j’ai pris quelques bons coups pour monter à 555 000, mais sans prendre de bounty. Il n’y a que des gros tapis à ma table » commente le stratège portugais.

Et tandis que je termine ces lignes, j’entends le cor de guerre qui sonne dans l’Event Center. Les floors viennent d’annoncer l’entrée dans l’argent, à 145 left. 13 000 $ de plus pour tous les mercenaires. Désormais, plus personne ne peut se cacher. A l’attaque !

Les deux font la perf’

Associés sur un coup de tête, les collocs Rémi Castaignon et Gaëtan Balleur se retrouvent au Day 3 du Tag Team, à 22 left d’un bracelet et de 190 patates.

Event #75 : Tag Team (Fin de Day 2)

Balleur Castaignon

Le double est une tradition française. On a eu les Santoro - Clément, les Llodra - Benneteau, Mahut - Herbert... Il y a désormais la paire Castaignon - Balleur. Colloc' de villa depuis plus de dix Vegas, les deux hommes ont décidé d’associer leur force et leurs jetons le temps d'un Tag Team, qui les porte jusqu'à un Day 3 de WSOP.

« C’est notre premier Tag Team à tous les deux. On s’est chauffé comme ça, explique très simplement Gaëtan, qui a lancé l’équipe sur de bon rail dès le Day 1. On a reg ensemble mais Rémi voulait aussi jouer le Mixed Big-Bet. Il n’a du jouer qu’une petite heure. J’ai longtemps été short mais ça s’est bien passé, on a fini à 140 000 jetons (sur 20 000 de départ) ».

Sur ce Day 2, le cash-gamer de Saint-Martin a pu davantage compter son alter-ego. Les deux hommes ont tout de suite convenu d’une stratégie très équilibré : 1 niveau chacun, soit des changements toutes les heures de jeu. « C’est étonnant comme expérience. T’as l’impression que tu ne joues pas. Le tournoi avance et toi tu regardes » commente Rémi.

Beer Level

A table, le temps fuse. Dans le rail, il se dilate, invitant les observateurs à la conversation. En table aussi d’ailleurs, le volume sonore est bien plus élevé que sur un tournoi moyen. Au moment où j’arrive, ils ne sont que 22 left et j’ai l’impression de parcourir une cour de récréation. Le “beer-level” a commencé depuis plusieurs heures, certains sont déjà passé au vin et les joueurs rient aux éclats sur toutes les tables. Une ambiance agréable pour aller chercher 190 patates.

Balleur Castaignon

La festivité n’empêche pas la compétition. « L’ambiance détendue, amicale, c’est surtout au début. Maintenant, c’est la guerre », corrige Gaëtan, qu’on avait vu réaliser un sacré deep run sur le 600 $ Deepstack de l’édition dernière. Entre deux gorgées de bières, les joueurs se livrent effectivement une bataille sans merci. Rémi met beaucoup de tension dans chaque affrontement et sort victorieux de la plupart des derniers coups, au point de passer de 500 000 jetons à 875 000 sur les deux dernières orbites.

Castaignon

« On a passé quasi tout le tournoi autour des vingt blindes. On a juste trouvé ce spot où ça open early, 3-bet bouton, et on se réveille avec deux As en grosse blinde. Re-shove, payé par deux Valets et on monte alors près des cinquante blindes » raconte Gaëtan, tandis que Rémi arrache un petit dernier pot pour conclure cette belle journée. Elle est quand même incroyable cette structure, reprend le joueur se rendant compte de la moyenne de 40BB à l’aube d’un Day 3 de 22 joueurs. Il ne reste pas grand monde, à part ce Brésilien qui a 1,7 million de gains, et la paire Wheeler - Nardi ».

Wheeler

Ce tournoi fun entre copains est définitivement en train de devenir un réel spot de perf’, et même de bracelet. « Maintenant, on va faire l’analyse tactique. Gaëtan a du me préparer un Powerpoint » blague Rémi, qui hésite plutôt entre faire un tour sur Freemont Street et boire des bières à la maison. Modérement bien sûr. Aussi étrange que soit cette occasion, Gaëtan et Rémi joueront demain pour devenir champion du monde de poker, entre copains.

Double J

Les chipleaders de la journée eux, semblent avoir déjà eu leur dose de houblons. « On est Joan et Javier, les double J. Notre stratégie est simple : moi, je gagne les flips, et lui, il vole les blindes. Nos remplacements ? Complètement random. C'est surtout quand il y en a un qui n'en peut plus ou que l'autre a envie de fumer.

Pas de braquage, pas de chocolat

Arrivé nombreux et armés aux portes de l’ITM, le Team Winamax se contente finalement d’un tir groupé dans les places payés. Les honneurs tout de même pour la résitance de Julien Sitbon, la bulle TF d'Adrian Mateos, et bien sûr pour Bruno Lopes, qui avait la main chaude.

Event #76 : Mystery Bounty 10 000 $ (Day 2)

Mateos

Six Team Winamax dans l’argent du 10 000 $ Mystery Bounty, l’un des plus beaux tournois des WSOP à cette gamme de buy-in. Une densité qui laissait présager de belles perfs, il n’en sera rien.

Le commando perd rapidement ses deux shortstacks Leo Margets et Bruno Lopes. Une déception toute relative pour le rappeur, qui a assuré l’ITM, mais surtout eu la bonne idée de piocher la prime à 100 000 $ juste avant sa sortie. 100k, le tarif Kool Shen sur ces WSOP, que l’artiste encaisse tous les trois jours.

Bien placés au moment d’entrer dans l’argent, Joao Vieira et Romain Lewis tombent finalement dans le gras du field, 104e et 57e position, sans avoir eu le temps de manger des bounties.

Sitbon

Etonnement, ce sont les deux joueurs les moins bien placés au départ de la journée qui prolongent le plaisir le plus longtemps. Julien Sitbon nous gratifie d’un superbe numéro de shortstack pour pousser l’aventure jusqu’en demi-finale. « C’est mon anniversaire, je ne peux pas buster aujourd’hui » répétait inlassablement le Français, comme un mantra protecteur, qui lui permettait de gratter les paliers.

Mateos

La belle résistance de Julien s’arrête finalement en 14e position, avec un chèque de 50 186 $, hors prime. Ça reste un bel anniversaire. Une petite demi-heure plus tard, Adrian Mateos quitte lui aussi ce tournoi à une frustrante 11e place, sur un set-up imparable, deux Dames contre les deux Rois de Tauan Naves.

Mateos Bust

« J’ai eu un bon milieu de journée qui m’avait permis de revenir dans la course. Il n’y avait rien à faire sur la fin, je crois que j’ai bien joué dans ce tournoi, je n’ai pas vraiment eu de spot compliqué, résume le Madrilène, qui regarde déjà vers les prochains tournois. Je ne sais pas encore quelle journée je vais choisir sur le Main Event, puisqu’il y a un beau 25 000 $ qui commence au Wynn demain ».

On te fait confiance pour le Wynn Adri. Nous, à partir de maintenant, on se met en mode “Main Event”.

Level 1, ponctualité quand tu nous tiens

Level 1 : Blindes 100 / 200, BB ante 200 Main Event 10 000 $ (Day 1A)

Les derniers seront les premiers

Franck
Seul parmi la vingtaine de qualifiés Winamax à tenter sa chance sur ce Day 1A, Franck est pourtant l'un des derniers qualifiés, chronologiquement parlant, après avoir pris son ticket sur l'ultime satellite à 250 € proposé par Winamax. "J'ai choisi le 1A pour pouvoir jouer le 800 $ Independance Day Celebration demain, pendant le 1B du Main", me confie-t-il avec les yeux brillants qu'on devine derrière ses lunettes fumées. Un bracelet remporté entre deux Day 1 de Main Event, est-ce que c'est déjà arrivé ? Pas à notre connaissance !

À la rituelle question « première fois », il répond par l'affirmative. « Je crois que c'est la première fois que je joue un tournoi hors de la France, et c'est ma première fois à Vegas. C'est vraiment un rêve éveillé pour moi d'être sur ce Main Event ».

Joueur occasionnel, qui joue « les Séries et quelques sessions du dimanche », Franck a également participé aux WSOP-C au Stade Jean Bouin il y a quelques mois et possède pour l'instant une Hendon Mob qu'on dira … en construction. Gestionnaire de patrimoine (en gros : gérer l'argent des riches), Franck me confie qu'il va peut-être en profiter pour recruter quelques clients parmi les joueurs de poker à Vegas. Mais pour l'instant, focus sur le Main Event qu'il est tout excité de jouer. « Pour l'instant, j'ai perdu 10k avec une paire de 10 contre une paire de Rois sur un baby board, mais rien de dramatique quand on voit la structure qu'on nous propose sur ce Main Event ». - Tapis_Volant

Esquiver les regs

Rosalie Petit
Le Day 1A du Main Event, c'est un peu celui des joueurs pressés, ceux qui ne veulent pas attendre deux, trois ou quatre jours avant de plonger dans le grand bain du plus beau tournoi du monde. Mais certains affichent des considérations un poil plus pragmatiques. « L'an passé, j'ai joué le Day 1C, pendant la Fête Nationale, et je l'ai regretté, nous dit Rosalie Petit. Il n'y avait que des regs, et très peu de récréatifs. » Du coup, changement de braquet cette année : la grindeuse était à table dès la toute première main du tournoi. Son raisonnement ? Les meilleurs joueurs auront mieux à faire aujourd'hui. « Il y a la Coupe de Monde de poker, à laquelle beaucoup de top regs participent. Il y a le Day 2 du Mini Main Event. Grosso modo, je pense que c'est sur le Day 1B et le Day 1C que les tables vont être les plus difficiles. » Rosalie fréquente les WSOP depuis 2021. Sur ce Main Event, elle va tenter d'aller chercher un deuxième résultat, après un min-cash en 2022. - Benjo

Anecdotes, statistiques et citations à la con

WSOP / Reportage
102 : le nombre de tables actives comptées une heure après le coup d'envoi, qui ne figurent absolument pas sur la photo ci-dessous puisque notre Caroline Darcourt préférée est allée s'aventurer du côté des tables du Paris, où le tournoi spécial Fête Nationale (Independence Day) fait le plein. Le Day 1A, lui, se joue uniquement au Horseshoe aujourd'hui. Bref, multipliez ce chiffre de 102 par 9 et vous obtenez une affluence provisoire de 918 joueurs sur le Day 1A. Mais attention : la plupart des tables ne sont pas encore remplies à capacité, nombreux sont les joueurs choisissant de « late reg ». Disons que ce chiffre correspond surtout aux prévisions faites en amont des organisateurs. Les officiels semblent avoir tablé sur une participation similaire à celui du Day 1A de l'édition 2023 (1038 partants). Bref, un départ au ralenti typique du Main Event : les trois autres Day 1 seront beaucoup, beaucoup plus peuplés.

1 : le nombre de pros du Team Winamax présents dès le Day 1A (soit un de plus que l'an passé) en la personne de Gaëlle Baumann.

WSOP / Reportage
Les équipes de Dans la Tête d'un Pro sont, elles aussi, dans la place... et sans vouloir trop vous spoiler, elles vous préparent quelque chose de véritablement inédit ! Comme le dit la formule consacrée : vous n'êtes pas prêts !

WSOP 2024 : tous nos articles

Level 1, un bon moyen de se faire la main

Level 1 : Blindes 100 / 200, BB ante 200 Main Event 10 000 $ (Day 1A)

Une revanche à prendre

Grégoire Auzoux
Arrivé en late reg sur ces WSOP 2024, il y a quelques jours, Grégoire Auzoux ne semblait pas très fier de sa participation immédiate au 50 000 $ PLO. "J'étais arrivé la veille, j'ai enchaîné avec une session de cash-game de 24h, dormi 3h et j'ai tenu à peine 30 minutes sur le tournoi, avec une bonne grosse gueule de bois, après avoir 4-bet shove un spot que j'aurais jamais dû prendre ". Et pourtant, malgré le fait qu'il joue désormais les plus gros tournois de la planète sur le circuit Triton, Grégoire conserve une certaine tendresse pour le Main Event, depuis son deep run en 2019 où il avait fini 91ᵉ pour un peu moins de 70 000 $.

« C'était mon tout premier 10K à cette époque-là, au final, c'est à la fois un de mes meilleurs et de mes pires souvenirs. Quand je bust sur le Day 6, j'ai une énorme rage de dents et j'ai galéré la veille pour repousser mon vol et changer mon hôtel. Je n'étais pas dans les meilleures conditions pour jouer et j'avais fini par spew sur un 4-bet shove avec As-Valet. J'aurais clairement dû aller chez le dentiste et ça se serait passé autrement. Avec l'expérience que j'ai maintenant, peut-être que la fin aurait été différente. »

À présent, Grégoire estime avoir beaucoup plus d'expérience sur la gestion des tournois live, sur sa manière de se préparer pour les longues heures de jeu qui l'attendent. Et si ça ne passe pas sur le Main Event, Grégoire a largement de quoi faire, avec tous les gros tournois prévus en parallèle du Main Event, comme les Series du Wynn ou le 50 000 $ des WSOP, ou des parties de cash-game juteuses en PLO (en privé, au Wynn), où l'on peut venir que sur invitation, et où ça joue en 100 / 200$ (et parfois en 200/400). - Tapis_Volant

Léo et les bas

Leo Soma
Autre joueur à avoir deep run ce Main Event (c'était l'an dernier et une belle 334ᵉ place), Leo Soma n'arrive pas dans les meilleures conditions sur ce Main Event après un Vegas compliqué. « J'ai fait 3 cashs sur 30 tournois, je joue tout entre 600 € et 2 500 € et j'ai aussi fait le 5 000$ 6-Max. » Mais, il garde le moral : « Ce ne sont pas de scénarios frustrants où je suis à la maison à 15h, j'arrive quand même souvent à monter plusieurs stacks de départ, c'est plutôt encourageant tout de même ». Et pourquoi on est là sur ce Day 1A ?

L'explication de Léo est assez rationnelle. « Je trouve que c'est beaucoup mieux dans les trois premiers jours pour avoir un jour de repos avant le Day 3, c'est l'un des jours les plus importants et c'est bien d'arriver frais ». Mais c'est surtout parce que 180 top regs sont en train de jouer la Coupe du Monde des joueurs de poker que Leo avoue avoir choisi ce Day 1A, un peu comme Rosalie Petit nous le confiait une heure plus tôt. « À la soirée Winamax, on parlait de ça avec les joueurs présents et tous les tops regs avaient l'air occupé avec le foot ».

Vainqueur d'un bracelet sur un 1 500 $ 6-handed en 2022, Leo savoure cette structure incroyable qu'on lui propose. « Je performe beaucoup plus sur ce genre de structure, c'est tellement deep, en plus c'est freezeout, j'apprécie encore plus ». Pour l'instant, tout se passe bien pour Leo, qui a déjà augmenté son stack de 30% avec les As dans un pot 3-bet preflop. Après un limp UTG à 200, un joueur isole à 600; Leo découvre AA et fait 2 000 au bouton. Il est payé deux fois. Les trois joueurs checkent le flop 456. Sur la turn 6, Leo est la seul à payer la mise à 7 000 du limpeur. Sur la river 9, il parvient à valoriser sa main en se faisant call-muck 10 000 et empoche un bon gros pot, histoire de bien lancer son aventure sur le Day 1A. - Tapis_Volant

Anecdotes, statistiques et citations à la con

Les nominés pour la promo 2024 du Poker Hall of Fame sont connus depuis hier. À charge, maintenant, aux joueurs en faisant déjà partie (et étant encore en vie) de choisir qui, parmi les dix noms qui suivent, va entrer dans le cercle des immortels. Il va falloir bien choisir, car il n'y a de la place que pour un seul intronisé ! Est-ce que ce sera Barny Boatman ou Patrick Antonius, nominés pour la première fois et seuls Européen dans la liste ? Ou plutôt Kathy Liebert, unique femme retenue ? Peut-être que ce sera enfin le tour d'une des figures nominées chaque année, comme Mike Matusow (beurk), le légendaire TD Matt Savage (yeah!) ou le fondateur de PokerStars Isai Scheinberg. Et sinon, cela pourrait aussi être le relativement jeune Josh Arieh, ou les vétérans John Cernuto, Ted Forrest ou Bill Smith. En revanche, une chose est sûre, ça ne sera pas Raymond Barre. Et c'est dommage.

Qui Nguyen
Parmi les deux ou trois ex-Champions du Monde croisés durant le premier niveau, le décidément très photogénique Qui Nguyen, vainqueur en 2016

WSOP 2024 : tous nos articles

Richez au Panthéon

Clément Richez entre dans l'histoire du poker français en remportant l'énorme Mid-Stakes Championship pour plus d'un million de dollars Une consécration teintée d'émotions pour l'un des tout meilleurs joueurs tricolores du moment Event #89 : Mid-Stakes Championship 3 000 $ (Day 4 et Finale)

Clément Richez Winner Photo Groupe

Il ne s'y attendait pas. Nous, un peu plus. D'abord parce que depuis 2022, nos Frenchies ont pris la fâcheuse habitude de faire trembler les murs du Horseshoe pile lors du jour de pause précédant la finale du Main Event. Ensuite parce que cela fait des années que Clément Richez fait partie des meilleurs joueurs français, si ce n'est de la planète. Avec sa Team Aim the Million, cofondée avec Benjamin Chalot, il est même devenu un personnage incontournable du panorama pokeristique francophone, contribuant à l'éclosion d'une myriade de grinders ultra-talentueux, le dernier en date n'étant autre que Malo Latinois, qui s'apprête ce mardi à prendre place autour de la table finale du Main Event. Comme tant d'autres tricolores encore présents sur place, le Breton a donc passé sa journée dans le rail de l'Event Center du Horseshoe, à encourager son mentor pour ce qui était sa première table finale WSOP, sur le colossal Mid-Stakes Championship à 3 000 $.

Car si Clément Richez fait, comme on l'a dit, partie de l'élite de notre pays deux cartes en main, il réserve habituellement son talent aux tables de cash game, et plutôt online que live. Expatrié depuis peu sur la côte mexicaine, après avoir longtemps sévi depuis Budapest, "Bibibiatch" vient en quelque sorte en vacances à Vegas, s'offrant une petite cure de live histoire de casser sa routine et voir quelles émotions les tables en dur peuvent lui offrir. Il en avait déjà eu un bel échantillon l'an passé, terminant 50ᵉ et meilleur Bleu du Main Event au terme de sept jours d'une partition quasi parfaite, éclaboussant la table télévisée de son style unique, aussi bien par son look que son jeu agressif et sans peur.

Clément Richez

De retour dans la Ville du Vice un an plus tard, c'est peu dire que les sensations n'étaient pas les mêmes. Après plus d'un mois sur place, les places payées se comptaient sur les doigts d'une main et les déceptions s'enchaînaient, documentées sans fard en vidéo sur la chaîne YouTube d'ATM. Dans le monde du poker de tournoi, la réalité d'un jour n'est jamais celle du lendemain (sauf peut-être lorsque l'on s'appelle Adrián Mateos). Et puis, après avoir vibré avec nos Français sur le Day 8 du Big One, nous sommes tout de même allés jeter un œil sur les autres épreuves en cours. C'est alors que "l'alerte bracelet" s'est déclenchée : sur l'Event #89, ce Mid-Stakes Championship à 3 000 $ au field gargantuesque de presque 3 200 entrants et promettant plus d'un million à la gagne, Clément Richez apparaissait en quatrième position au chipcount à l'attaque des demi-finales.

Face à lui, un parterre de joueurs aussi redoutables qu'expérimentés, comme le chipleader américain Taylor Black, plus de 4 millions de dollars de gains au compteur, dont deux wins à sept chiffres, le Britannique Adam Owen, régulier des WSOP comme du circuit européen, le 11ᵉ du Main Event de l'an dernier Alec Torelli ou encore le taulier russe Andrey Pateychuk. Pas de quoi effrayer Clément, qui ne quitte jamais la tête de course de tout le Day 4, s'asseyant autour de la table finale avec le deuxième plus gros tapis. Un double up avec deux Dames contre le Roi-Valet de Torelli lui permet de se replacer à quatre joueurs restants, avant de se charger de l'élimination du Chinois Dong Chen pour prendre la tête. Si l'élimination de Torelli par Owen lui fait démarrer le heads-up avec un déficit en jetons d'un contre deux, il renverse la balance en un rien de temps, avant de finir le travail moins d'une heure plus tard. Le voici désormais Champion WSOP, plus riche de 1 041 989 $, mais surtout d'un bracelet et de sensations qu'il n'avait jamais connues à une table de poker.

Clément Richez Copine

"Je tremble de partout, a-t-il avoué à nos confrères de PokerNews après sa victoire. Je ne pensais ressentir autant d'émotions. J'étais à deux doigts de pleurer pendant la séance photo et je vais sûrement finir par pleurer après ça. J'ai besoin de relâcher la pression." Une pression qu'il n'a pourtant pas ressentie tant que ça à table, davantage concentré sur son jeu que les enjeux. "Je n'ai pas regardé combien il y avait à la gagne. Je jouais une main après l'autre, en essayant de faire de mon mieux." Ce n'est qu'une fois la dernière carte distribuée que Clément a fini par se rendre compte de ce qu'il venait d'accomplir. "C'était ma première finale WSOP, et elle s'est déroulée comme dans un rêve. Voire encore mieux que ça. Mes adversaires se faisaient sortir les uns après les autres et, d'un coup, j'étais en tête ! C'est incroyable, tout joueur de poker rêve de gagner un bracelet. Ce n'était pas forcément un objectif pour moi, mais après avoir gagné, j'ai pris conscience que si, c'en était un." Pour un éternel joueur de cash game, n'est-ce pas la déclaration d'amour ultime aux World Series, et à ce qu'elles représentent aujourd'hui dans l'imaginaire pokeristique ?

En parlant d'amour, cette finale et cette victoire étaient d'autant plus chargées émotionnellement pour Clément qu'il a pu compter sur le soutien, dans son rail, de celle qui est récemment devenue sa femme, arrivée à Vegas juste à temps pour partager ce moment avec lui. On fait confiance à nos reporters sur place pour retrouver Clément avant la fin de ces WSOP et recueillir ses impressions à froid. En attendant, l'heure est aux célébrations, en conclusion d'une journée qui a bien failli être marquée par un deuxième bracelet tricolore (on vous en parle très vite). Bravo Clément !

WSOP 2024 - Event #89 Mid-Stakes Championship 3 000 $ 3 177 entrées (re-entries inclus) - Prizepool 8 482 590 $

Clément Richez Winner Photo Solo

# Joueur Gains
Vainqueur Clément Richez (France) 1 041 989 $
Runner-up Adam Owen (UK) 694 714 $
3e Alec Torelli (USA) 517 525 $
4e Dong Chen (Chine) 388 519 $
5e David Uvaydov (USA) 293 950 $
6e Taylor Black (USA) 224 152 $
7e Andrey Pateychuk (Russie) 172 285 $
8e Boris Kuzmanovic (Croatie) 133 479 $
9e David Brehme (UK) 104 248 $

Crédits photo (sauf Clément Richez seul) : Regina Cortina / PokerNews

WSOP 2024 : tous nos articles

L’histoire était en marche

Toujours deux sans trois : en terminant runner-up du 10k 6-max Championship, Alexandre Réard manque de devenir le premier Français à remporter trois bracelets WSOP à Las Vegas, mais aussi un incroyable back-to-back sur un tournoi qu'il avait déjà gagné l'an passé. Après la troisième breloque tricolore des Series 2024 glanée par Clément Richez quelques heures auparavant, le poker hexagonal aurait aussi pu vivre une journée historique... S'il loupe le trophée, l'Avignonnais encaisse néanmoins un beau lot de consolation : 610 013 $, et c'est toujours ça de pris. Le pro Winamax Adrián Mateos poursuit lui son bel été avec une jolie 5e place.

Event #94 : NLHE Championship 6-Handed 10 000 $

Reard
Nos titres était déjà prêts. Sans aller jusqu'à commencer à écrire nos articles (on connait le pouvoir du jinx à la rédac&#39:wink:, on se voyait déjà raconter dans ces colonnes le troisième sacre d'Alexandre Réard aux World Series of Poker. On y a cru, mais pourtant : le Français termine runner-up du Championship 6-Handed, le tournoi le plus cher des Series dans ce format chéri des grinders français. Car Alex est finalement tombé sur un run plus fort que lui lors du heads-up, celui de Michael Rocco. En deux coups de cuiller à pot, l'Américain, qui avait abordé le duel avec trois fois moins de jetons que le Français, a renversé la situation, dans un scénario catastrophe pour le pro Unibet : un 20/80 gagné avec deux Septs contre deux Huits à tapis préflop alors qu'il était couvert, d'abord. Puis, moins d'un quart d'heure après, une confrontation deux paires contre deux paires à l'avantage du Français, qui se transforme en full pour Rocco à la river, alors que tous les jetons étaient partis au milieu au turn. Michael lui-même ne semblait ne pas en revenir… Et nous non plus, à vrai dire. Car près la consécration en 2021, et la confirmation de 2023, on attendait qu'Alex parachève sa démonstration entamée à l'amorce du dernier acte . Et pour cause : les raisons d'espérer un tel dénouement étaient nombreuses, rationnelles ou non…

Reard2Le déroulement de la fin du tournoi, tout d'abord. On a vérifié sur le reportage des WSOP : avant ce heads-up face à Michael Rocco, le Français a éliminé pas moins de 6 adversaires sur les neuf derniers joueurs en course, en commençant par un énorme strike à la bulle de la table finale : avec deux Rois, le Français sort ainsi sur la même main Brad Albrinck (9e) et Connor Rash (8e) dans un pot joué à fond préflop. De quoi démarrer la TF à sept dans la peau d'un énorme chipleader, avec plus de 10 millions de jetons en sa possession quand tous ses adversaires sont alors comptés entre 3,775 millions et 2,025 millions… Un chiplead qu'il laissera brièvement à Adrián Mateos (on y reviendra ci-dessous), avant de reprendre sa marche en avant en éventant un bluff de l'Espagnol, puis en éliminant Fahredin Mustafov (7e) sur un coinflip à suspense, en terminant « Amadi » sur un 30/70 chanceux (5e), en achevant le shortstack Aram Zobian (4e) puis en passant un service gagnant à Aleks Dimitrov, 3e, dans une confrontation deux paires contre deux paires inférieures. Jusqu'à ce fameux duel, donc…

Outre cette position favorable cartes en mains, Alex jouait également pour l'histoire : tenant du titre sur ce 10k 6-Handed, après son bracelet gagné l'an passé contre Stephen Chidwick, le grinder établi au Pays de Galles avait l'occasion de réussir un incroyable et probablement inédit back-to-back sur ce tournoi. Et surtout, Alex avait l'occasion d'entrer dans l'histoire du poker français, en devenant le second tricolore à gagner trois bracelets WSOP après Julien Martini (qui en possède quatre aujourd'hui), mais surtout le premier à en gagner trois à Las Vegas.

D'ailleurs, il y avait aussi cet enjeu de performance globale pour l'ensemble du poker tricolore, là aussi inédite : apporter à la France un deuxième bracelet dans la même journée, Clément Richez ayant été sacré quelques heures plus tôt sur le Mid-Stakes Championship. Imaginez un peu l'euphorie en cas de victoire, dans un rail déjà chauffé à blanc… Enfin, il y avait là une occasion de terminer en beauté une campagne vegassienne en demi-teinte pour Alex, du moins à l'échelle d'un joueur comme lui : 9 places payées sur les épreuves live depuis début juin certes (dont 8 ITM WSOP), mais aucune finale ou même demi-finale à se mettre sous la dent. Et malgré les 131 725 $ accumulés, pas sûr que la somme soit suffisante pour boucler un Vegas vraiment gagnant, concernant un joueur ayant disputé plusieurs tournois au buy-in à cinq chiffres. En tout cas, de ce point de vue, l'affaire est désormais entendue : avec les 610 013 $ récoltés pour cette seconde place sur ce 10k 6-Max, et alors que les WSOP touchent à leur fin, Alex rentrera en Grande-Bretagne avec une bankroll bien mieux garnie qu'à l'arrivée, et dieu sait que ne c'est pas le cas de tous ses congénères à Las Vegas.

Adri
Mais Alex n'était pas la seule star de cette finale, en tout cas pour les membres de la famille Winamax : le second au chipcount au départ du dernier acte (à égalité avec Egor Procop) n'était autre qu'un certain Adrián Mateos. Une nouvelle preuve de sa régularité sans faille, lui qui jouait rien de moins que sa troisième TF de l'été à Sin City, la première datant d'il y a déjà un mois sur le Super Highroller à 250 000 $, sans oublier un beau deeprun sur le Main Event dont il était second en jetons à la fin du Day 4. Mais la « Máquina » n'a pas gagné son surnom par hasard, sa soif de titres n'étant décidément jamais étanchée. Et autant dire que le Madrilène a évidemment été un adversaire redoutable pour Alex, les deux joueurs s'écharpant à de nombreuses reprises dans le dernier acte.

Comme on l'a expliqué, Adri était même rapidement passé en tête, à la faveur d'un très beau hero call contre le Français, qu'on ne peut s'empêcher de vous raconter ici. Relance UTG de l'Espagnol à 200 000, payé par Alex au siège suivant. Le flop vient QJ8, et Amadi décide de ne pas c-bet, Alex choisissant d'aller voir un turn gratuitement, sur lequel Adri check encore. Mais c'est pour mieux check-raise à 1 150 000 la mise à 350 000 du Tricolore… qui décide de suivre. La river est un 9, qui entraine une mise de seulement 400 000 chez Mateos. Intéressant, non ? Attendez la suite : après réflexion, Alex, qui couvre alors l'Espagnol, envoie son tapis, demandant les 3,2 millions restants d'Amadi !

Adri Reard
C'est le moment de vous révéler la main de ce dernier : K10 pour une quinte. Alors, on fait quoi ici, sur ce board où une couleur est possible ? Au bout de presque quatre minutes, Adrian, qui se tenait la tête dans les mains, fait son choix : ce sera un call. C'est la bonne décision, comme souvent : Alex avait transformé en bluff son AQ.

Par la suite, Adrian ratera cependant un bluff contre le Français, et au bout du compte, c'est bien Alex qui aura raison d'Adri, avec un peu de réussite tout de même, en gagnant As-9 contre 9-9 à tapis préflop. Adrián Mateos termine finalement 5e de ce tournoi pour 198 261 $. GG, encore une fois…

Calamusa
Et on n'oublie pas Pierre Calamusa : débarqué tardivement à Vegas, LeVietF0u prend la 17e place de ce Championship, pour 47 493 $. Vous retrouverez rapidement les réactions des différents protagonistes dans ce reportage. En attendant, il reste encore une poignée de tournois à jouer dans ces WSOP 2024 : on nous parle notamment d'un David Benyamine bien placé à dix joueurs restants dans le 25 000 $ HORSE… Et si ce heads-up perdu n'était finalement que partie remise ?

Event #94 - NLHE Championship 6-Handed 10 000 $
418 entrées (Freezeout) - Prizepool 3 887 400 $

Vainqueur1













































# Joueur Gains
Vainqueur Michael Rocco (USA) 942 922 $
Runner-up Alexandre Réard (France) 610 013 $
3e Aleks Dimitrov (Bulgarie) 410 657 $
4e Aram Zobian (USA) 282 302 $
5e Adrian Mateos (Espagne, Team Winamax) 198 261 $
6e Egor Procop (Moldavie) 142 316 $
7e Fahredin Mustafov (Bulgarie) 104 465 $

Crédits photos : Rachel Kay Winter / PokerNews Paco

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