Soma (déjà) au sommet
Event #14 : 1 500 $ No-Limit Hold'em 6-max (Day 3)​
La jeune pépite du Team Nutsr ouvre le compteur français sur cette édition. A 23 ans, Léo Soma décroche son premier bracelet WSOP pour 456 889 $.
Une première marseillaise va retentir dans l’enceinte du Paris. Elle sera jouée en l’honneur d’un garçon que personne ne connaissait vraiment. Certes, les screens de ses perfs encombrent régulièrement les fils d’actualité des grinders suivant les réseaux sociaux du Team Nutsr. Olux a déjà accompli de nombreux exploits sur les rooms online, mais pour ce qui est du Live, ce visage juvénile n’apparaissait sur aucun coverage, aucun site de poker, aucune photo de vainqueur.
Il se présente à ce monde de la plus belle des manières. Pour son deuxième tournoi WSOP, Léo Soma abat un field 2 393 joueurs pour remporter son premier bracelet et un gain colossal de 456 899 $.
Net et sans bavure
Sa victoire ne souffre d’aucune contestation. Dominateur de bout en bout, Olux a produit un poker de haute volée, faisant parler ses skills de grinder au moment des demi-finales, à l’image de ce bluff d’anthologie face au champion du monde Joe Cada, pour surgir en table finale en tant que chipleader.
Il a ensuite déroulé pendant un peu plus de trois heures, marchant sur la table pour écraser la concurrence et éliminant un à un les joueurs voulant entraver sa route vers le bracelet.
Évidemment, une telle victoire ne vient pas sans réussite. Après avoir claqué le bluff du tournoi, Léo Soma valide un bad beat important contre ce même Joe Cada. En début de finale, les deux joueurs partent dans une inévitable rencontre à tapis, où le vainqueur du Main Event 2009 tient deux barbus contre le As-Roi du Français. Un as au flop et Léo s’offre le scalp du quadruple bracelet WSOP, tout en accroissant son avance au chipcount.

Leo a passé presque toute la journée au delà des 100 puis des 80BB, conservant son chiplead de la première à la dernière main de la finale.
Son stack dominant lui permet de mettre un maximum de pression sur ces adversaires. Il ouvre beaucoup de mains, 3-bet à foison et gratte beaucoup de petits pots pour maintenir ses adversaires la tête sous l’eau. Personne ne parviendra à respirer.
Son aggressivité incessante lui fait perdre un peu de crédibilité. J'en veux pour preuve ce 3-barrels sur un board Q
7
7
8
4
où le Français se fera snap-call par Ivan Zhechev, très confiant avec son simple Q
10
. Mais cette fois, Léo Soma tient 9
7
, pour un brelan floppé et un nouveau nom à son tableau de chasse.
Avec désormais 34 millions de jetons, le Valencian est seul au monde. Pas un seul adversaire au-dessus des huit millions au moment du 5-max. L’Argentin Maximiliano Gallardo remonte légèrement en éliminant Derek Sudell dans une rencontre Q
Q
contre 3
3
, puis Thomas Schultz revient en trouvant son as avec A
7
pour craquer les deux Rois du français. Mais ce bad beat ne changera rien. À peine vingt minutes plus tard, Olux revient déjà près des 40 millions, sans besoin de showdown, à la force du poignet.
Il se charge lui-même de sortir Daniel Wellborn. Duel de blindes entre les deux hommes, open shove de Léo et call de l’Américain pour ses 10BB avec un solide A
J
, devant le 6
7
du Français. Le rail tricolore appelle alors 7, qui tombe dès le flop 7
5
K
. Deux briques plus tard, Wellborn est éliminé au pied du podium.
Gallardo a tenté de ne pas se faire marcher dessus. Affichant une belle résistance, l'Argentin s'est pris finalement le retour de bâton, suite à un call un poil téméraire.
Derrière, il enchaîne avec l’élimination de Maxi Gallardo, sur un coup rondement mené. Open 2,9x en SB, l’Argentin paye et double check sur le flop 6
9
4
. Léo envoie 4 blindes sur la turn A
puis le tapis sur la river 10
. Gallardo n’y croit pas et paye avec K
6
. Mauvais timing, le Français avait trouvé la quinte avec 8
7
.
Le voilà en heads-up, avec 10 fois plus de stack que son adversaire américain. Voisin du Français depuis le début de finale, les deux hommes semblent rigoler d’une issue qui ne fait plus de doute, tant l’écart de stack et de niveau paraissent importants. Malgré un premier double-up du shortstack, le heads-up sera en effet de courte durée.
Open 1 million du Français défendu par Schultz, et c-bet 1,3 million sur le flop J
3
6
, payé encore. Sur la turn 7
, Schultz lead all-in pour ses 3,8 millions restants. Olux call sans trop de problèmes avec ses deux paires J
3
, et devra éviter un pique contre le K
9
adverse. La River vient 10
. Ca y’ est, Olux vient de remporter 456 000 dollars, et son premier bracelet WSOP.
À pas de géant
Le jeune prodige saute dans les bras de sa Team qui l’a scruté toute la journée. Plutôt du genre fanfaron, Boris « Lebordelaii » Berthomet entonne des chants à la gloire de la France et de son héros du soir Olux. Venu pour raser Vegas, l’équipe menée par Romain Nusmann avait signé la première grosse perf tricolore de ce Vegas, avec la 2e place de Clément « Kortex » Van Driessche sur un 600 $ au MGM. Cette fois, la victoire est d’un autre ordre de grandeur. À seulement 23 ans, pour sa première virée en Live avec le Team, Olux apporte le premier bracelet de l’histoire Nutsr, et le premier bracelet tricolore de cette édition 2022.
« C’est incroyable, je suis juste rempli de joie, rempli de bonheur, je ne comprends pas bien ce qu’il m’arrive encore. La somme, le bracelet, le titre de champion du monde, je redescendrai peut-être pendant de trois jours », commente le joueur après la traditionnelle séance photo.
S’il connaît bien l’émotion d’une win sur des séries online, Léo est peu habitué encore aux sensations des grosses finales en Live. Pas de quoi être déstabilisé dans sa grind, même pour une de ses premières tables finales. « J’avais fait quelques tournois puisque j’ai fait mes études à côté d’un casino (à La Grande-Motte). J’ai déjà fait une ou deux tables finales, mais c’était sur des petits tournois à 300 €. Pas la même atmosphère, le même genre de field ou de prix. Ce 1 500 $, c’est même le tournoi le plus cher que je jouais de toute ma vie, rappelle le Valencian. J’étais énorme toute la TF, donc les payjumps impactaient plus les autres que moi. Je ne les ai même pas regardés de toute la finale ».

Le bracelet vient couronner le talent de Léo, mais aussi le travail de toute une équipe. Tel Nadal dans un discours post-victoire à Roland-Garros, le joueur n'oublie pas de mettre en avant l'importance de son entourage technique. « C’est dans ces moments-là qu’on sait ou va le projet. On a construit cette équipe ensemble. On vient pour deuxième Vegas, même si je ne faisais pas partie de la première virée, qui s’était mal passé. On était un peu en questionnement et là c’est incroyable. Kortex qui claque la perf dès la première semaine, maintenant le bracelet en deuxième… Il y a de l’avenir dans cette équipe ».

Un moment historique pour Nutsr et un pas de géant pour Léo Soma, qui réalise à seulement 23 ans le rêve ultime de tout joueur de poker. « C’était un de mes accomplissements long-terme. Je ne pensais pas le réaliser si vite. Après avoir cocher un objectif aussi gros que celui-là, il va falloir re-fixé des objectifs ambitieux, parce que c’est ça qui me « trigger » le plus. Je vais devoir y réfléchir, mais j’ai encore un gros mois à Vegas. L’objectif ça va être d’aller chercher d’autres finales, et d’autres bracelets si possible, pourquoi pas ? ».
Talentueux et ambitieux, Léo Soma se présente aujourd’hui aux yeux de la planète poker. Son maillot Olux a attiré les projecteurs de la table finale. On se mouille peu en présageant de revoir bientôt ce blaze sur d’autres grandes tables internationales. Bravo Olux et à dans deux jours, à 14H heure de Vegas, pour la première Marseillaise de l’histoire des WSOP au Paris.